Les représentants permanents de l'UE à Bruxelles, sous la férule de la France et de l'Espagne, se sont mis d'accord pour traiter avec le Maroc sur le dos des Sahraouis. Les Européens veulent prolonger d'un an un accord controversé qui leur permet, en échange de quelque 36 millions d'euros par an, de pêcher dans les eaux marocaines, y compris celles du Sahara occidental annexé par le Maroc depuis 1975, selon des diplomates. Les représentants permanents de l'UE à Bruxelles se sont mis hier d'accord pour négocier cette prolongation avec le Maroc, malgré les réticences d'une minorité d'Etats. Cette décision de principe devrait être entérinée demain par les ministres de l'Agriculture, selon les diplomates. Au départ, plusieurs Etats, dont l'Allemagne, avaient fait état de réticences à cause des garanties insuffisantes apportées par le Maroc concernant l'utilisation de la contrepartie financière à l'accord de pêche. L'accord, qui fixe le montant de la contribution européenne, les zones de pêche et les quantités de poissons concernées, arrive à échéance fin février. La Commission européenne proposait de prolonger l'accord d'un an pour étudier ses conséquences sur les ressources en poissons «ainsi que l'impact régional» des fonds versés par l'Union européenne, sur la base notamment des informations fournies par les autorités marocaines. L'idée d'une extension de deux ans, défendue par certains Etats, dont l'Espagne et la France, n'a en revanche pas été retenue, selon un diplomate européen. Un peu plus de la moitié de la compensation financière versée par l'UE est destinée à mettre en œuvre une politique de «pêche durable» dans les eaux marocaines. De nombreuses ONG dénoncent la pêche européenne au Sahara occidental, qui a lieu, selon elles, en violation du droit international. Pillage légalisé Depuis mars 2007, l'UE verse 36 millions d'euros par an de droits de pêche au Maroc pour permettre à quelque 119 navires européens, principalement espagnols et portugais, de pêcher dans ses eaux. Parmi les navires concernés figurent aussi une dizaine de thoniers français. En réaction à la caution européenne au pillage des ressources du peuple sahraoui, l'association italienne de solidarité avec le peuple sahraoui (Jaima Sahraouie) basée dans la région d'Emilie-Romagne, a appelé hier à une manifestation jusqu'au 20 mars prochain contre le renouvellement de l'accord de pêche entre l'Union européenne et le Maroc, à Rome. Manifestation le 20 mars L'association juge cet accord «illégal car aucun pays au monde n'a reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental». «Néanmoins, l'UE octroie au Maroc chaque année, des millions d'euros pour permettre aux navires communautaires de pêcher dans les eaux sahraouies», dénonce l'association. «Les activités de l'UE au Sahara occidental doivent cesser immédiatement», souligne l'appel, ajoutant que «le Maroc continue de se montrer peu coopératif dans le processus de décolonisation du Sahara occidental, au mépris de la centaine de résolutions de l'ONU réaffirmant le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination». L'ONG relève par ailleurs que «les autorités marocaines continuent de commettre de graves violations des droits humains contre les Sahraouis qui manifestent pour pouvoir exercer leurs droits». Elle rappelle la position de l'ONU vis-à-vis de l'exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental, soulignant que l'Organisation a réaffirmé que cette exploitation ne peut être effectuée «sans la prise en compte des intérêts du peuple sahraoui». L'association demande «instamment» à la Commission européenne de «cesser immédiatement l'octroi de licences permettant aux navires de pêcher dans les eaux du Sahara occidental», et ce, «jusqu'à ce que une solution pacifique au conflit sahraoui soit trouvée». Le 27 février s'ouvriront les négociations pour le renouvellement de l'accord de pêche entre l'UE et le Maroc.