Les territoires palestiniens étaient hier le théâtre d'un fait d'une extrême gravité, exprimant en lui-même la nature de la relation, en supposant qu'elle continue à exister, entre l'Autorité palestinienne et la population elle-même encadrée dans le bon ou le mauvais sens par des hommes ou des groupes armés. C'est en fait l'acte le plus récent d'une série d'autres exprimant le rejet de l'Autorité palestinienne et de ses institutions. On ne peut expliquer autrement l'attaque hier à Ghaza qui a pris pour cible, le chef par intérim du service des renseignements palestiniens, qui a été grièvement blessé dans une attaque qui a fait deux morts et trois autres blessés. Le général Tarek Abou Rajab, 58 ans, a été atteint de plusieurs balles à la poitrine et à la jambe lorsque des inconnus ont ouvert le feu sur son convoi près du camp de réfugiés d'Al Chatti, voisin de la ville de Ghaza, alors qu'il se rendait à son quartier général, selon les mêmes sources. Il a été transféré à l'hôpital Al Chifa de Ghaza où son état a été qualifié de « grave ». Chef adjoint des renseignements, le général Abou Rajab assure l'intérim à la direction du service depuis la démission en juillet du général Amine Al Hindi à la suite d'une vague d'enlèvements et de troubles dans la bande de Ghaza. L'attaque a été menée depuis l'intérieur du camp d'Al Chatti par des hommes masqués qui ont ouvert le feu en direction du convoi de trois voitures avant de prendre la fuite. Tout ce que le chef de la sécurité préventive, le général Rachid Abou Chbak, qui a rendu visite à son collègue blessé à l'hôpital, pouvait souligner c'est que « l'Autorité palestinienne doit prendre des mesures fermes pour mettre fin à cette dégradation sécuritaire qui n'épargne plus aucun responsable palestinien », a-t-il ajouté. C'est déjà un constat qui a le mérite de la clarté, puisque, relève- t-on, il est clairement affirmé que l'embuscade a été tendue par des Palestiniens. Ce qui ajoute au contexte déjà lourd dans lequel évolue très difficilement le leader palestinien qui n'arrive pas à asseoir son autorité, ou encore que celle qu'il continue à assumer ne fait nullement le consensus au sein de la population palestinienne. Un sentiment que les jeunes institutions palestiniennes tendent à traduire en actes ou tout simplement en lois, autrement dit des réformes. En ce sens, apprenait-on hier, une commission du Parlement palestinien appelait hier à un remaniement du gouvernement du Premier ministre Ahmad Qoreï lors d'une réunion très attendue consacrée aux réformes. Les députés du Conseil législatif palestinien (CLP, Parlement) devaient débattre à Ramallah d'un rapport élaboré par une commission qu'ils avaient chargée d'examiner les obstacles à la mise en œuvre d'un programme des réformes au sein de l'Autorité palestinienne. Les 14 membres de cette commission se sont entretenus à plusieurs reprises avec le président de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat, sans obtenir de mesures concrètes dans le domaine des réformes, bien qu'il se soit engagé à en mettre en œuvre dans un discours devant le Parlement le 18 août. « Le CLP va écouter le rapport de la commission sur les réformes et ses contacts avec le président Arafat. Nous savons que ces discussions n'ont abouti à rien », a déclaré le vice-président du Parlement, Hassan Khreiché. Un autre membre de la commission sur les réformes, Saôdi Al Krounz, a pour sa part affirmé que celle-ci avait tenu une ultime réunion houleuse mardi soir. Quant au député Hatem Abdelkader, il dit pourquoi il faut un autre cabinet. Selon lui, en effet, le gouvernement actuel ne pouvait appliquer un programme de réformes, puisque certains de ses membres sont soupçonnés d'implication dans des affaires de corruption. M. Abdelkader n'a pas cité de noms, mais les ministres des Affaires civiles Jamil Tarifi, de l'Economie Maher Al Masri et des Affaires étrangères Nabil Chaâth ont, par le passé, été épinglés par le CLP pour leur implication présumée dans des cas de corruption. Il revient à dire au leader palestinien de faire le ménage pour préserver son aura et son autorité tout simplement bafouée avec des actes où la volonté de tuer chasse tout symbole, et ne pas voir entamé le crédit de l'institution qu'il représente. C'est tout un programme mais la tâche n'est pas insurmontable.