L'auteur du petit livre Indignez-vous (éditions Indigène), devenu en quelques mois un best-seller mondial, continue, à 93 ans, à se battre pour un monde où les hommes et les femmes sont des citoyens libres dans des Etats libres. - Avez-vous été surpris par le grand succès de votre livre Indignez-vous ? Comment expliquez-vous le retentissement qu'il a eu dans l'opinion publique ? Bien entendu j'ai été très surpris, nous étions partis pour un tirage de huit mille (8000) exemplaires et maintenant nous en sommes à un million quatre cents mille (1 400 000) exemplaires. - Cela veut dire que ce besoin de s'indigner est beaucoup plus répandu que nous ne le pensions, non seulement en France où ce petit livre indique toutes les raisons que l'on a de se rappeler les valeurs du temps du Conseil de la résistance, du temps de la Déclaration universelle des droits de l'homme et qu'il est donc temps de se poser la question, pourquoi ces valeurs ne sont plus respectées et qu'est–ce qui a fait que nous ne sommes plus aussi sûrs d'une évolution vers une démocratie sociale, réelle, forte… La rapidité avec laquelle cela a intéressé beaucoup de Français et maintenant un grand nombre d'étrangers, puisque c'est dans plus de 17 pays que ce petit livre a été diffusé et traduit dans 15 langues, cela veut dire que ce souci de ne pas laisser se dégrader des valeurs importantes, nous le partageons avec beaucoup plus de gens que nous le pensions, des gens de notre génération qui ont vécu tout cela, mais aussi avec des gens des générations successives, et en ce moment des plus jeunes avec lesquels le contact est particulièrement intéressant et qui ont des raisons de s'indigner, qui ont envie de s'indigner, et c'est pour cela que ce livre a un tel succès. - Comment observez-vous ce qui est en train de se passer au Maghreb et dans le monde arabe ? Je pense que le moment est venu de s'apercevoir un peu partout dans le monde, mais en tout premier lieu dans les pays despotiquement gouvernés, qu'il est possible désormais pour les peuples, eux-mêmes, de revendiquer plus de justice sociale, un accès pour tous à l'éducation, à la santé, au logement, toutes choses qui figurent dans la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée il y a 65 ans, mais qui ne sont pas encore traduites dans la réalité. Ce besoin de traduire dans la réalité ces valeurs, les peuples du Sud de la Méditerranée l'ont profondément ressenti comme pouvant conduire, par leur indignation d'abord, leur engagement ensuite, à plus de justice sociale et à une vraie démocratie.