Il existe une assise de la sous-traitance industrielle en Algérie, mais son émergence réelle est freinée par les importations de pièces de rechange qui sont pourtant fabriquées localement, et ce, malgré les 25% de préférence nationale dans tout marché public. Cette mesure n'a rien changé, puisque les importateurs proposent des produits à des prix inférieurs à ceux des entreprises algériennes qui fabriquent des pièces aux normes européennes, selon les propos des différents chefs d'entreprise intervenant dans ce dossier. Donc, les importateurs sont privilégiés lors des soumissions, car c'est le «moins disant » qui est retenu. Par ailleurs, les entreprises algériennes font face à de nombreuses difficultés financières en matière de crédits ou de foncier. Pour les crédits en général, seulement les 3000 milliards de dinars sont octroyés, selon une source bancaire qui ne donne pas de chiffres sur les crédits accordés aux sous traitants puisque dans les bilans des banques il n'est pas précisé à quel effet est accordé tel ou tel crédit. Pour Nacer Hideur, SG de la Banque Al Baraka d'Algérie : «Beaucoup d'entreprises qu'elles soient de l'univers de la sous-traitance ou autre sont mal structurées, mal gouvernées et ne présentent pas des références ou une surface suffisante». Pour leur part, les banques «ne cherchent qu'à placer leur trésorerie dans des affaires rentables et quelle que soit leur volonté de s'impliquer dans l'effort de financement du plan de développement national ne peuvent pas et ne doivent pas distribuer des crédits à tort et à travers». Pour lui, la dépendance des entreprises algériennes sous-traitantes d'un seul donneur d'ordre ou d'un seul secteur constitue un facteur défavorable pour l'obtention de crédits nécessaires à leurs projets. Jusque-là, les banquiers justifiaient le refus par l'épée Damoclès qui était suspendue sur leur tête et qui vient d'être retirée par la levée de la responsabilité pénale des gestionnaires décidée lors du Conseil des ministres du 3 février dernier. Faute de foncier, les sous- traitants restent de petites PME S'agissant du foncier, les entreprises sont dans l'incapacité de soumissionner afin d'acquérir des actifs dormants (des entreprises dissoutes) vendus aux enchères, car, pour les chefs d'entreprises activant dans la sous-traitance, ce foncier fait l'objet de spéculation et sa valeur peut être multipliée. Plusieurs sous traitants activent dans des « caves » ou des « garages », selon Brahim Bendris, président de l'UPIAM (Union professionnelle des industriels automobiles et mécaniques) qui affirme que «la sous-traitance dans le secteur de la mécanique existe, mais il faudra la développer». Dans les meilleurs cas, ces petites PME, dont le nombre d'employés ne dépasse pas les 20 personnes, ont installé leurs ateliers sous leurs maisons comme c'est le cas de Garniflex, à Blida, alors que d'autres comme Afric moule plastimeca industrie (Dar El Beïda) et Africable (Baba Ali) dans des hangars plus convenables dans des zones industrielles. Cependant, et pour l'extension de leurs activités respectives, ces sous traitants sont confrontés aux difficultés de la bureaucratie mettant ainsi en péril des projets qui permettraient aux entreprises nationales donneurs d'ordre d'économiser des milliards de dinars. Les sous traitants considèrent que la préférence nationale devra permettre aux entreprises locales de s'imposer sur le marché national et d'avoir la priorité aux marchés publics et aux crédits. Or, les donneurs d'ordre et les banques ne l'entendent pas de cette oreille puisque pour les premiers, les conditions de soumission sont identiques en matière de cautionnement et de fiscalité pour l'entreprise productrice et l'importateur. La meilleure formule : les donneurs d'ordre entourés de leurs sous-traitants Côté bancaire, on estime que «la préférence nationale ne doit pas s'exercer à travers le canal des crédits bancaires » mais à travers la législation fiscale et douanière. En effet, l'entreprise importe des produits semi-finis et l'importateur des produits finis en payant la même taxe douanière. Pour M. Hideur, «si ces entreprises ont besoin d'assistance financière à fonds perdu, c'est à l'Etat qu'il convient de le faire à travers les bonifications, les incitations fiscales, les garanties, voire même les subventions s'il le faut. Ce n'est pas aux banques de le faire». De son côté, Zaïm Bensaci, président du Conseil national consultatif de la petite et moyenne entreprises (CNCPME), déplore qu' «il n'existe pas de stratégie ni de politique dans la sous-traitance ». Car, «à ce jour les états généraux de la sous-traitance n'ont pas été tenus» et «rien n'est fait aujourd'hui c'est pourquoi nous demandons leur tenue parrainée par le chef de l'Etat pour qu'il y ait cet accompagnement politique». Il s'interroge : «Faut-il acheter ou produire ?» Pour M. Bensaci, il existe un créneaux qu'est la sous-traitance qui a permis ailleurs aux pays de se développer notamment en Méditerranée. Il affirme qu' «en Algérie, le marché existe puisqu'il y a de grands donneurs d'ordre surtout les sociétés nationales (publiques) qui importent des pièces réalisables ici». Toutefois, il existe environ 200 entreprises sous-traitantes seulement, selon lui, ce qui est «insuffisant». Pour développer le tissu d'entreprises sous-traitantes, le président du CNCPME demande «la création de PME et PMI destinées à la sous-traitance à travers des porteurs de projets au niveau des universités, à travers les centres de facilitation et pépinières et à travers les dispositifs de crédits mis en place en ciblant des filières comme la mécanique l'agro-industrie et les services ». Il propose de «donner des avantages comparatifs à des gens qui pourront ainsi investir dans des créneaux et leur faciliter l'accès au foncier ainsi que des avantages fiscaux». M. Bensaci suggère aussi «la récupération des actifs dormants comme pour le cas de la SNVI qui a des terrains en permettant aux sous traitants de s'implanter sur ces terrains ». Une suggestion également faite par le président de l'UPIAM qui cite aussi l'ENMTP Constantine ((Entreprise nationale du matériel des travaux publics), PMA (Entreprise de production de matériel agricole) à Sidi Bel Abbès.