Les Hauts-Plateaux sétifiens qui ont été les pionniers et précurseurs en matière de construction de logements ont relégué un secteur aussi stratégique à la dernière loge. Le manque de plan de charge a non seulement déstructuré une branche importante, source d'emploi et animatrice du commerce, mais a porté un sacré coup à la spécialité ayant perdu sa technicité, son savoir-faire et une main-d'œuvre hautement qualifiée. Ne voyant rien venir, des milliers de maçons, ferrailleurs, plâtriers et carreleurs ont été obligés de changer de métier. Avec son potentiel humain et son savoir-faire, la wilaya de Sétif qui était dans un passé récent à l'avant-garde du secteur est à l'heure actuelle à la traîne. Dire qu'elle est la région par excellence des matériaux de construction - agrégats (1 500.000 m3/an), carrelages, faïences, marbre, plinthes (10.070.000 m2/an), dalles de sol (1.670.000 m2/an, céramiques sanitaires (200.000 unités/an), plâtres (20.659 T/an), ciment (1.000.000 T/an), briques (220.000 T/an) , tubes en plastique (9000 T/an), menuiserie (900.000 m2/an) et fils électriques (32.000 T/an) . Ses capacités de production et d'autres lui confèrent sans conteste la première place à l'échelle nationale .Néanmoins, la réputation des bâtisseurs des hauts plateaux a été brisée par les " options " des décideurs de la wilaya qui ont tourné le dos à l'adage : " quand le bâtiment va, tout va " Respect des délais Cette démarche a envoyé ce vivier de bâtisseurs au fond de l'abîme. Pour preuve, Sétif est, en matière de programme, du respect des délais de réalisation et de livraison de logements à caractère social, à la traîne. En conséquence à cette pratique, le fossé entre l'offre et la demande est de la dimension d'un océan. Avec les lenteurs et les déficits enregistrés des décennies durant, le recasement de plus de 60.000 demandeurs ne sera ni simple ni réalisable à moyen terme. En dépit du changement de cap, prôné par le nouveau wali faisant de la réalisation de 40.000 logements dont 25000 LSP (logements sociaux participatifs), son cheval de bataille. Si le lancement de cet immense chantier redonne de l'espoir aux demandeurs d'un toit d'une wilaya ayant mis ces dernières années une chape de plomb sur une telle activité, certains spécialistes mettent encore et toujours sur le tapis le coût du mètre carré administré n'ayant fait l'objet d'aucune révision depuis son application en 1995. Pour ces entrepreneurs, ce prix est pour beaucoup dans le travail bâclé s'apparentant dans de nombreux cas vérifiés lors du séisme de Boumerdès, à des châteaux de sable : " Avec un tel coût, il est quasi impossible de construire selon les normes parasismiques et de procéder au renforcement des aciers. L'édification de voiles de contre-ventement, la construction avec des matériaux de qualité et le recrutement d'une main-d'œuvre qualifiée et déclarée sont dans pareilles conditions utopiques " nous confie sous le sceau de l'anonymat un des promoteurs qui illustre ses propos par les chiffres : " Le prix de revient d'un poteau ferraillé de 8T 16 s'élève à 20 995 DA/ m3. La valeur des poutres de 14 T et 2 T finies avoisine les 20 000 DA/m3. La maçonnerie double paroi coûte 1 340 DA/m2. " Notre interlocuteur qui n'oublie pas de parler des 35 % représentants les charges patronales à verser à la CNAS considère que le mètre carré habitable réel à la réalisation doit se calculer à partir de 23 000 DA et plus. Ce montant doit être calculé et actualisé par des techniciens au fait des réalités du terrain. " La sous-évaluation entraîne des bavures et la triche qui gangrène un tel secteur fortement ébranlé par le séisme de Boumerdès " souligne le professionnel qui estime en outre que ce prix ouvre d'une part la voie à la spéculation et met de l'autre en péril les trésoreries des entreprises ne pouvant supporter le surplus des charges. Cette situation est à l'origine des retards dans la réalisation et la réception des programmes. Elle se termine dans de nombreux cas par la résiliation des marchés accentuant ainsi la galère des citoyens et le trou du trésor public, obligé de supporters des charges imprévues. D'autres promoteurs vont plus loin, mettent le doigt sur les deux poids de mesures, des pouvoirs publics qui avantagent les entreprises étrangères : " L'offre des chinois inhérente aux 500 logements AADL d'El Eulma est de 20% plus élevée que celle des entreprises algériennes en charge d'un projet similaire à Sétif " précise un bâtisseur qui n'est pas dit-il gagnant dans un projet de 18 000 DA/m² et en TTC. Terrains accidentés Les lenteurs bureaucratiques, le manque d'assiettes foncière, les terrains accidentés sont les autres entraves qui minent, un secteur qu'on veut extirper du coma dans lequel des éminences grises l'ont engouffré. Pour relancer une telle machine en mesure de booster le marché du travail de la deuxième wilaya du pays en nombre d'habitants (1 500 000 âmes) qui souffre elle aussi du taux de chômage, dépassant la barre des 20%, 40 000 logements sont au programme. Le logement social participatif (LSP) détient avec 25 000 unités à construire d'ici, l'échéance 2009, la part du lion. Cette formule qui touche la catégorie moyenne des citoyens n'ouvrant pas droit au logement social met, directement l'acquéreur devant bénéficier d'une substantielle aide de l'état (par le biais du CNL) en contact avec le promoteur " prié " de bâtir un f3 (60 à 70 m²) et un f4 (70 à 80 m²) avec un coût ne devant pas dépasser les deux millions de dinars, est pour le wali une solution à la crise. L'administration joue dans une telle opération qui donne de l'espoir aux demandeurs de toit, un rôle de régulateur et de contrôleur. " Avec ses capacités de production, la wilaya de Sétif ayant construit en un temps record le deuxième pôle universitaire, une fierté nationale est en mesure de réaliser cet ambitieux projet dans les délais, avec, en sus un meilleur rapport qualité prix. Notre ambition est de créer un marché de l'immobilier devant prendre en charge ce dossier qui est l'une des priorités du Président de la République. L'état injecte à cet effet, 1 200 milliards de dinars annuellement, tout au long du programme quinquennal, et ce, pour répondre à la demande qui sera avec un tel effort satisfaite un jour où l'autre ". Le commis de l'état qui fait de l'édification de 40 000 logement, un challenge personnel est, dit-il, en pourparlers avec de nombreuses sociétés étrangères, très intéressées par les opportunités d'investissement dans les hauts plateaux sétifiens, une région carrefour. Échange d'expérience Dans l'optique de valoriser le potentiel existant et de promouvoir un secteur qui renaît de ses cendres, un salon du bâtiment, le premier du genre à l'échelle nationale sera organisé du 14 au 19 décembre 2005 à Sétif. Placée sous le patronage du ministre de l'Habitat et du wali, ce rendez-vous, regroupera de nombreux professionnels et industriels de la branche. Il constituera sans nul doute, l'occasion idoine pour l'échange d'expérience et d'idées. Les initiateurs de cette manifestation profiteront de la rencontre pour tisser, promouvoir le cas échéant des relations de partenariat. Cette opportunité ne se contentera pas uniquement d'exposition de matériel et de matériaux de construction, sera rehaussée par des journées techniques et des communications animées par des spécialistes en, la matière. Des visites à certains chantiers où sont lancés les 10 000 logements représentants le premier lot d'un vaste programme est à l'ordre du jour des participants du SETIBAT 2005. Les managers de l'AMC et BCR spécialisés respectivement dans la fabrication des compteurs d'eau, de gaz de ville et d'électricité pour l'une, et les mélangeurs (bain -douche, douche à main) mélangeurs lavabo et les mélangeurs d'évier, robinet d'arrêt général à gaz 20/22 ainsi que dans divers robinets et autres accessoires s'adressant au secteur de l'habitat, sont très intéressés par ces nouvelles opportunités. Pourvu que les autres acteurs jouent le jeu d'autant que la qualité des produits de ces entreprises publiques est reconnue par les professionnels et de nombreux étrangers ne sous traitant pas avec les adeptes de la contre façon qui fait rage et qui met la vie et la santé des citoyens le plus souvent en danger. Mohamed Guettouche, le PDG d'Algerian Company Invest Bulding (ALCIB) qui vient de se doter d'une centrale à béton d'une capacité de 1 200 m3/J, considère quant à lui, le projet sus nommé, réalisable : " Avec la technicité et le savoir-faire, qui sont les nôtres, l'édification des 25 000 logements sociaux participatifs prévus, est possible d'autant que les bâtisseurs de la région ont de tout temps relevé les défis. " Ce patron d'une entreprise de 350 travailleurs ayant réalisé une partie du deuxième pôle universitaire et d'autres équipements, précise : " Avec un capital expérience de plusieurs années et une main-d'œuvre qualifiée et intéressée, Sétif sera comme à l'accoutumée au rendez-vous ". Le DG de SAFCER, Amar Seklouli n'étant autre que le fils de Kaddour Mazza, un entrepreneur de la première heure, est du même avis : " Notre complexe de Didouche Mourad produisant annuellement 1 200 000 tonnes de briques sera en plus de nos unités de faïences et dalles de sol, mis à contribution pour faire du projet des 40 000 logements, une réalité palpable. Dans l'adversité, les entrepreneurs des hautes plaines sétifiennes se transcendent. Surtout quand il s'agit de la réputation que nul n'a le droit de remettre en cause. Le projet peut en cours de route rencontrer des problèmes mais, avec la volonté et la bonne foi, les pires obstacles seront à mon sens vaincus. " Les citoyens concernés ayant attendus pour s'abriter vont devoir patienter jusqu'à la mi 2006 pour juger les intentions des décideurs de la cité.