La crise en Libye s'est aggravée hier après la mort de plusieurs civils dans des raids aériens, menés dans le sud-ouest de Tripoli par les forces de l'OTAN. Cette dernière a suscité de nombreuses critiques suite à la décision de certains pays membres de l'envoi d'instructeurs auprès des rebelles. Les forces de l'Otan ont mené hier des raids sur la région de Gharyan, au sud-ouest de Tripoli, faisant des morts et des blessés, a rapporté l'agence libyenne Jana. Le raid a détruit des habitations et terrorisé des femmes et des enfants, selon Jana. Mercredi, la même agence avait annoncé que 7 civils ont été tués et 18 blessés lors de raids de l'Otan sur la région de Khellat Al Ferjan, au sud-ouest de Tripoli. Alors que les bombardements de l'Otan se poursuivent de façon plus accentuée, les affrontements entre les forces loyales au colonel El Gueddafi et les rebelles n'ont pas cessé, notamment autour de Misrata (ouest), théâtre de combats quasi quotidiens depuis plusieurs semaines, où deux photographes, l'un américain, Chris Hondros, et l'autre britannique, Tim Hetherington, ont trouvé la mort mercredi dans des combats. Le porte-parole du régime, Moussa Ibrahim, a déclaré hier être «très triste» à cause de la mort des deux journalistes tout en affirmant que son armée n'était pas responsable. Un médecin ukrainien a également été tué et une infirmière blessée par des tirs de mortier à Misrata, a indiqué le porte-parole du ministère des Affaires étrangères ukrainien. Dans l'ouest du pays, les rebelles libyens ont réussi hier à prendre le contrôle du poste-frontière de Wazzan, l'un des principaux entre la Libye et la Tunisie, à l'issue de brefs combats avec les forces libyennes. Mais pour bon nombre d'analystes, la rébellion n'est pas encore en mesure de faire le poids devant l'armée régulière libyenne plus entraînée et expérimentée et surtout mieux équipée. Devant cette situation qualifiée d'impasse, des pays de l'Otan qui participent aux frappes aériennes, dont la Grande-Bretagne, la France et l'Italie, ont annoncé l'envoi de conseillers et d'instructeurs militaires à Benghazi «pour entraîner les rebelles». Critiques L'annonce de l'envoi d'experts militaires par les pays de l'Otan n'a pas laissé le régime libyen sans réaction. Ce dernier a averti que cette action pourrait menacer les opportunités de paix dans ce pays et risquerait de faire éterniser le conflit, tout en soulignant que «si l'Otan arrête ses attaques, il y aura un véritable cessez-le-feu». Cette décision a été également critiquée par plusieurs pays, qui jugent que le conflit libyen risque de s'aggraver davantage, en l'absence d'initiative diplomatique pour mettre fin à la crise. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a ainsi qualifié l'envoi de conseillers militaires étrangers pour «entraîner les rebelles libyens», d'«acte extrêmement risqué et aux conséquences imprévisibles», estimant que cela revenait «clairement à un engagement terrestre dans le conflit». «L'histoire est riche en exemples de ce type. On commence par envoyer des instructeurs et ensuite ça dure pendant de longues années, faisant des centaines et des milliers de morts de chaque côté», a-t-il soulevé. Des critiques ont également fusé en Grande-Bretagne, où un groupe de parlementaires compte interpeller, mardi prochain, le gouvernement sur l'envoi des conseillers militaires en Libye, selon le député Jeremy Corbin. «Il est clair que l'Occident soutient les rebelles et veut les armer avec le soutien de certains pays arabes, comme le Qatar. Il y a des intérêts, même s'ils ne sont pas exprimés», a souligné ce député, ajoutant que des «parlementaires s'opposent à l'envoi de conseillers britanniques en Libye et ils le feront savoir». Sur le plan humanitaire, la situation de la population est toujours précaire et «dans son ensemble fait face à une pénurie de produits alimentaires», a déploré la secrétaire générale adjointe aux Affaires humanitaires, Valerie Amos. Pour permettre l'acheminement de l'aide aux régions touchées par le conflit et autoriser aux agences humanitaires de venir en aide aux personnes qui se trouvent dans le besoin, un accord a été conclu entre l'ONU et le gouvernement libyen, a fait savoir Mme Amos.