Aucune information n'a filtré des entretiens de Mahmoud Jibril et Nicolas Sarkozy, hier à Paris. L'envoyé spécial des Nations unies pour la Libye, Abdellah El Khatib, a annoncé hier qu'il se rendra demain dans la capitale libyenne, Tripoli. Il a fait cette annonce à l'issue d'entretiens à Athènes avec le ministre grec des Affaires étrangères, Dimitris Droutsas. Le ministre grec a tenu à souligner que son pays «va contribuer à ce voyage important» de l'émissaire de l'ONU à Tripoli. De son côté, Mahmoud Jibril, numéro deux d'une rébellion libyenne à court d'armes et d'argent pour continuer sa lutte contre le colonel El Gueddafi, a de nouveau été reçu, hier, par Nicolas Sarkozy. L'entretien entre le président de la République française et le responsable libyen, en présence du Premier ministre, François Fillon, a duré quarante-cinq minutes et n'a donné lieu à aucune déclaration, ni du côté libyen ni du côté français. M. Fillon à ses côtés, M. Sarkozy est venu accueillir M. Jibril sur le perron de l'Elysée à 15h30 et l'a raccompagné trois quarts d'heure plus tard. Selon l'Elysée, l'entretien devait porter «sur la situation en Libye et sur le processus de transition démocratique», près de deux mois après le début des frappes aériennes de l'OTAN, le 19 mars, autorisées par l'ONU pour «protéger les civils libyens» des forces du colonel Mouammar El Gueddafi. C'est la deuxième fois que M. Jibril est reçu par M. Sarkozy. Le 10 mars dernier, il avait déjà été accueilli avec deux autres membres du Conseil national de transition (CNT) libyen. La France avait officiellement reconnu, à cette occasion, le CNT comme «représentant légitime du peuple libyen» et avait décidé d'envoyer un ambassadeur à Benghazi, siège de la contestation au colonel El Gueddafi, à un millier de kilomètres à l'est de Tripoli. Depuis, seuls quatre autres pays ont reconnu le CNT : l'Italie, le Qatar, la Gambie et le Royaume-Uni. Sans reconnaître diplomatiquement la rébellion libyenne, les Etats-Unis, où M. Jibril se trouvait vendredi pour plaider sa cause, l'ont toutefois jugée «légitime et crédible». La rébellion à sec Le président Sarkozy s'est même déclaré prêt à se rendre à Benghazi, sans toutefois préciser quand. Début mai, il avait annoncé qu'il allait proposer «dans les semaines qui viennent» l'organisation d'une «conférence des amis de la Libye» pour préparer la transition politique du pays. Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, vient pour sa part d'appeler à intensifier la pression militaire sur le régime du colonel El Gueddafi, ce dernier ne comprenant que «la force». Dans ce contexte, espérant trouver une oreille compatissante à Paris, Mahmoud Jibril, comme il l'a fait la veille à Washington, a certainement dû demander au président français de l'aider à trouver l'argent et à acquérir les armes qui lui font cruellement défaut. Le CNT a chiffré ses besoins financiers à trois milliards de dollars dans les mois à venir pour faire face à ses dépenses, notamment le paiement des fonctionnaires. Concernant l'armement, le ministre de la Défense, Gérard Longuet, a été très clair, il y a quelques jours à Londres : la livraison d'armes à la rébellion est pour le moment exclue. Fin avril, la France avait pourtant jugé «légal» et conforme à la résolution de l'ONU que des pays (autre qu'elle-même) «puissent livrer des armes permettant à la population libyenne de se défendre». Mais la situation entre Paris et le CNT s'est peut-être tendue après la mort, jeudi à Benghazi dans des circonstances encore obscures, d'un ancien parachutiste français, Pierre Marziali, reconverti patron d'une société militaire privée, la Secopex. Quatre de ses employés ont également été arrêtés. Selon la Secopex, basée à Carcassonne, Pierre Marziali était en relation avec le CNT qui lui avait demandé un soutien en formation et en matériel. Le CNT soutient de son côté que la Secopex mettait «en danger la sécurité de la Libye libre».