Les stewards et les hôtesses ont finalement cloué au sol, hier, l'ensemble des appareils de la compagnie Air Algérie. Tous les vols de la compagnie ont été annulés à la suite de la grève générale lancée par leur syndicat. Une réunion ayant regroupé le PDG et le syndicat a été sanctionnée par un accord de prise en charge de toutes les revendications socioprofessionnelles. La reprise des vols a été décidée. Près d'une centaine de vols programmés pour la journée d'hier par la compagnie Air Algérie ont été annulés. La grève générale illimitée annoncée, il y a plus d'une dizaine de jours, par le Syndicat national du personnel navigant commercial Algérie (SNPNCA) a été largement suivie, et ce, en dépit de l'ordonnance d'annulation rendue par le juge des référés près le tribunal d'El Harrach, après la plainte déposée par l'employeur. Dès le prononcé de cette décision en fin de journée de mardi, et par respect à celle-ci, le bureau syndical a appelé à une assemblée générale hier matin (à 4h), à la salle des opérations de l'aéroport d'Alger, pour décider de la suite à donner à leur mouvement de contestation. Finalement, c'est la base qui a décidé de maintenir le cap. Le refus affiché par l'administration d'ouvrir les portes du dialogue a été pour beaucoup dans ce durcissement. A l'unanimité, les travailleurs ont opté pour la poursuite de la grève. A part les vols à l'extérieur et qui devaient rentrer hier, aucun appareil n'a décollé, prenant de court les très nombreux passagers du fait de la saison estivale. Sur les tableaux électroniques, toutes les destinations affichaient «annulé». Une situation que les passagers ont du mal à accepter, notamment ceux en transit qui ont raté leurs correspondances. En l'absence d'information, la contestation a pris de l'ampleur. L'arrivée du PDG, Wahid Bouabdellah, n'a pas pour autant incité le personnel navigant à reprendre son activité. Donc sous la pression, il demande à ouvrir le débat avec les syndicalistes. Un débat qu'il avait refusé, deux jours auparavant, lorsque le bureau exécutif avait été invité par son secrétaire général, lequel avait surpris en annonçant le dépôt de plainte par la compagnie pour faire annuler la grève. Mieux, dès le prononcé de l'ordonnance du juge des référés portant annulation du mouvement, le PDG, dans une note adressée au personnel navigant commercial, juge que la grève est une «manipulation» dont «le motif fallacieux que la direction de l'entreprise serait opposée au dialogue social n'a qu'un seul but : assouvir des ambitions personnelles». Wahid Bouabdellah affirme que «les auteurs du préavis de grève ont été reçus, à leur demande, le 13 juin 2011, pour exposer leurs revendications qui se sont révélées ne consister qu'en un conflit de représentativité au sein du syndicat et pour lequel ils demandent à l'employeur, en contradiction avec la loi, de procéder à de nouvelles élections, en gelant les travaux des commissions paritaires (…)». Le PDG, relève «la stricte neutralité dans le processus de désignation des représentants des travailleurs et que lui-même interdit à tous les représentants de l'autorité au sein de l'entreprise de s'immiscer dans le processus des élections syndicales». Il rappelle que «depuis deux semaines, un travail collectif traitant du régime de travail et de la rémunération se fait avec la participation de tous les représentants des corporations concernées». Largement diffusé par les médias lourds en fin de journée (mardi), un autre communiqué, signé par la direction générale d'Air Algérie, était adressé aux passagers, partenaires et employés de la compagnie qu'elle «a tenu à rassurer que le programme de l'entreprise se poursuivra normalement». Et de préciser : «Consciente que l'aboutissement de son plan de développement, amorcé, est pour l'instauration d'un climat social sain et serein, elle a engagé pour cela avec l'ensemble de ses partenaires sociaux une concertation visant à prendre en charge les préoccupations des différents collectifs de l'entreprise.» Une réaction qui va susciter la colère des travailleurs et celle de leurs représentants syndicaux. Ces derniers, faut-il le préciser, avaient tenu leur assemblée générale, à Alger, il y a près de deux semaines et rendu publique (à travers la presse privée) une plateforme de revendications strictement socioprofessionnelles. Il s'agit, de «l'amélioration des conditions de travail du personnel navigant commercial au niveau des aéroports et la révision de l'accord salarial de 2003 jugé totalement dépassé». N'ayant pas ouvert les portes du dialogue, la grève était inéluctable. Hier, les négociations entre le PDG et le bureau syndical du SNPNCA, présidé par M. Hamamouche, ont duré plusieurs heures, pendant lesquelles aucun vol n'a décollé. Tout le personnel attendait les résultats des entretiens pour décider de la reprise du travail ou de la poursuite de la grève. Finalement, le PDG a accepté de prendre en charge l'ensemble des revendications et un délai de trois semaines lui a été accordé pour les concrétiser, faute de quoi une autre grève illimitée serait enclenchée. Le personnel a décidé de reprendre le travail dès aujourd'hui, et même durant la nuit d'hier (pour ceux qui avaient des vols de nuit). Dans une déclaration, le président du syndicat, M. Hamamouche, a «salué la mobilisation des travailleurs venus très nombreux à l'assemblée générale tenue à 4h du matin (hier). Ce sont eux qui ont pris la décision de maintenir la grève et de ne laisser aucun vol partir. Lors de la réunion, tenue l'après-midi, à la demande du PDG, ce dernier s'est montré réceptif et ouvert à toutes les négociations, en précisant qu'il a été trompé sur la situation. Il a accepté de prendre en charge notre plateforme de revendications. Un délai de trois semaines lui a été accordé. Ce résultat a été obtenu grâce à tous les travailleurs». Une victoire pour le syndicat autonome, dont les représentants étaient, jusqu'à hier, considérés par la direction générale comme non représentatifs. En tout état de cause, durant la matinée seulement, au moins une soixantaine de vols programmés par la compagnie avaient été annulés. Ce qui constitue un préjudice financier énorme au moment où l'entreprise peine à sortir du creux de la vague depuis que les organismes internationaux de contrôle technique la menacent de l'inscrire sur leur liste noire…