Poumons d'une agglomération, les jardins publics ou les parcs constituent une véritable entité écologique et de petits havres de tranquillité, invitant les citadins à se soustraire un tant soit peu à la nuisance acoustique que génère le charivari du centre urbain ou les plages grouillantes. «Dans le dédale d'un jardin, il est des moments de grâce qui illustrent mieux que mille mots les bienfaits d'une évasion mêlés au plaisir d'une pause» dit un sage. Mais ce n'est pas toujours évident, a fortiori lorsque ces petits édens se voient transformés en lieux où il n'est pas aisé de rentrer, l'espace d'un temps, en communion avec Dame nature et son exotique atmosphère. Les urbanistes de l'époque ne pouvaient omettre d'implanter ces espaces verdoyants au sein même du plan d'une ville, entre chaque pâté d'immeubles, à l'effet d'amadouer le paysage urbain. Parc Sofia, parc Beyrouth (ex-Mont-Riant), parc Prague (Bhirat Marengo), parc de la Liberté (ex-Charles Galland) et autres parcs Zyriab, Tunis et Conakry sont autant de lieux censés inviter le quidam à la décompression et les vieux retraités à venir meubler leur temps en trompant peu ou prou leur oisiveté. S'il est vrai que certains de ces endroits sont joliment entretenus par l'Edeval, d'autres semblent livrés à eux-mêmes et font l'objet de dégradations (bancs, arbres, lampadaires, éléments architectoniques d'une statue, etc.). L'air dépité par l'image qu'offre le cadre, une vieille dame nous interpelle pour nous évoquer «le temps où les familles venaient se requinquer, l'intervalle d'un après-midi, à Bhirat Marengo (…). L'époque où le sens civique dictait à chacun de nous de prendre soin des éléments composant l'espace de farniente (…)». De ne pas abîmer le patrimoine floral qui égaye le lieu, poursuit-elle sur une note amère. En effet, peu de jardins, de nos jours, échappent, malheureusement, à ce réflexe aux antipodes du civisme, sans compter le sentiment d'insécurité fort présent chez certaines familles qui n'osent plus se prélasser dans ces lieux autrefois plus attractifs. Outre cette nuisance que d'aucuns trouvent plaisir à commettre au sein même de cet environnement de détente, il n'est pas loisible, parfois, d'emprunter ces sites enchanteurs, ou de profiter de ce qu'ils offrent comme vertu «déstressante». Un père de famille qui avait l'habitude d'emmener sa marmaille gambader dans le jardin de la Liberté ou pour rallier le musée des antiquités qui se trouve en amont, se dit outré car, nous dit-il, «des choses pas très catholiques se passent à l'intérieur de cette enceinte dont le voisinage s'est plaint à maintes reprises, vainement». Aussi, à Bhirat Marengo, nombre de gens ont été victimes d'agression. «Une horde sévit dans les parages», relève avec regret un riverain. Elle choisit sa proie pour la délester de ses biens sous la menace d'armes blanches. Il est un lieu commun aussi de relever l'état de décrépitude d'autres espaces publics comme le jardin Conaky à Bologhine, la partie sud du jardin Guillemin, le jardin de la Basetta (ex-Place du Tertre). En face du TNA, l'ex-square Bresson au milieu duquel trône un kiosque à musique est abandonné, aujourd'hui, à son triste sort, sinon devenu un point de chute de gueux, cambistes et autres SDF, au même titre d'ailleurs que le Balcon St Raphaël dominant la baie d'Alger, transformé lui aussi en bar à ciel ouvert. L'Edeval certes, tente tant bien que mal d'entretenir ces espaces et s'emploie à les sécuriser grâce à l'intervention de ses brigades canines, mais la détérioration de ces lieux est parfois manifeste et «il n'est pas aisé de protéger ces endroits de ressourcement des déprédateurs», relève non sans dépit un gardien exerçant dans le parc Beyrouth où, souligne-t-il, «des pans d'ouvrages architecturaux sont arrachés par endroits».