Un nom aux sonorités psychédéliques, qui nous évoque les effluves de drogues s'évaporant dans la chaleur de l'Afrique. Mais bien plus que cela, il s'agit surtout de l'addiction à la musique de ces cinq rockers en herbe. De jeunes talents prometteurs, qui offriront à un public déjà mordu de leur son un album détonant d'ici la fin de l'année. Ils sont cinq. Et comme les cinq doigts de la main, l'alchimie fonctionne. Quant à leur intrigant surnom, ne vous méprenez pas : «Afrockaine, c'est africain, rock et «caïne». Par rapport à la position géographique, le rock, et la dépendance à la musique, car quand on y touche on devient vite accro», nous expliquent-ils. Parmi ces cinq accros, il y a Younès Kacimi Hassani, le chanteur du groupe. A ses côtés, les deux guitaristes Mehdi Haddouch et Sid Ali Chaïb. Pour les accompagner, Hakim Kaddouri à la basse et Saïd Tamach à la batterie. Souvent, une vocaliste les rejoint. Nous les rencontrons dans la chaleur suffocante des sous-sols de l'association SOS Bab El Oued. Ils nous jouent un morceau décapant, qui nous fait l'effet d'une boisson énergisante. Sur les murs de ce repaire, des peintures de Charlie Chaplin et du Che, comme pour rappeler les qualités d'un bon musicien : le charisme et l'âme révolutionnaire. Car ils espèrent bien révolutionner le rock algérien. Leurs inspirations ? «Chacun a ses préférences, notre batteur est rock des années 60/70, old school, moi je suis plus hard rock, Mehdi apporte sa touche andalouse, alors on essaie de fusionner tout ça, faire quelque chose d'asymétrique», nous explique énergiquement Sid Ali. Leur album, en cours d'enregistrement, se veut être un mariage de plusieurs influences. «Il y aura des influences rock et algériennes, deux styles qui s'opposent mais le trait d'union sera l'énergie (…), un mélange de rock, blues, de la musique algéroise, targuie, berbère, celtique...» Un cocktail explosif, en mode afrockaïnien. Ils chantent en arabe pour mieux parler aux Algériens mais aussi en anglais, pour le «cachet international». Pour le moment, le groupe s'autoproduit, mais espère signer avec une maison d'édition pour la commercialisation de son disque. Lucides, nos rockers reviennent sur la difficulté de percer en Algérie. «Il y a un public rock, mais ce qui manque ce sont les supports médias. Ce n'est pas comme en Occident où le rock est une culture. Ici c'est un extra par rapport à la culture.» Pour eux, le problème vient surtout de l'image que l'on a de la scène musicale algérienne, des clichés qui lui collent à la peau, mais aussi du piratage qui «peut tuer l'artiste». Et pour s'en sortir, il faut savoir innover. Car il est incontestable que la musique doit être évolutive. Bien plus qu'un patchwork de notes, c'est un véritable langage, un exutoire, parce que garder les choses en soi «ça rend malade». Et grâce à leur rock, ils veulent faire passer des messages. La situation actuelle en Algérie les inspire, mais c'est bien avant qu'ils ont commencé à écrire des textes contestataires, comme 3ich normal en 2009. «Un musicien qui n'a rien à dire n'a qu'à faire de la musique classique. Nous, on vient tous d'une classe moyenne, on raconte ce qu'on vit. Si on venait des beaux quartiers d'Hydra, on raconterait l'été dans nos piscines.» Et pour se faire connaître, le groupe a de la suite dans les idées. Il projette de tourner trois clips vidéo, et de créer un site internet. Une tournée est également prévue en France, début 2012 à Saint-Etienne, Toulouse et peut-être aussi Paris et Montpellier, afin de venir titiller des oreilles «déjà affranchies» de l'autre côté de la Méditerranée. Mais fidèles à leur pays, ils veulent connaître un peu plus le public algérien et projettent une tournée nationale. Avec toujours pour objectif de cultiver l'interaction avec leurs fans, car «c'est peut-être une histoire de longue durée». Et leur fibre rock'n rollesque les pousse à dénicher d'autres addicts «qu'ils veulent entraîner avec eux» afin de renouveler le rock algérien. Bonne chance.