Construit à proximité des ruines romaines à Tipasa, le complexe touristique Matarès accueille, chaque année, un nombre important d'estivants venus se reposer et profiter de leur congé en toute quiétude. les bénéficiaires des œuvres sociales des grandes entreprises nationales, des particuliers venus des quatre coins du pays et quelques immigrés en font leur destination estivale. Conçu dans un style architectural rappelant l'antique Tipasa, des villas, deux hôtels et une résidence donnent directement sur la mer. Rien de plus plaisant pour passer d'agréables vacances. A première vue, tout va bien, rien à dire. Un accueil chaleureux, des visages souriants, ravis de voir venir les nouveaux occupants. Un décor soutenu par un autre paysage fantastique. Celui de la brume matinale laissant apparaître le majestueux mont Chenoua. Un instant de pur plaisir, où l'on songe déjà aux merveilleux moments que l'on va passer entouré de toute cette beauté. Mais le rêve commence à perdre de sa brillance quand arrivent les premières mauvaises surprises pour gâcher l'ambiance. Sur place, les arrivants sont souvent confrontés à une longue attente avant de pouvoir rejoindre leur lieu de résidence et les chambres qui leur sont réservées. Les commentaires commencent alors à fuser et les premiers signes de mécontentement s'affichent sur les visages des nouveaux clients. «L'origine de ce désagrément provient de l'attitude des sortants», justifie M. Abed, directeur du complexe. «La plupart d'entre eux ne respectent jamais les heures fixées pour les départs, ils nous rendent les clés à leur guise et cela nous empêche de faire correctement notre travail», regrette t-il. Même si le règlement intérieur est affiché sur toutes les portes, rares sont les estivants qui y prêtent attention. On a beau préciser les modalités de séjour, mais, apparemment, personne ne prend la peine de le lire, encore moins de le respecter. CAPHARNAüM Côté chambres, le nettoyage est une course contre la montre. Les femmes de ménage entament un sprint pour ramasser des ordures laissées à même le sol, signaler les dégradations des meubles et remettre en état toute cette «pagaille». Passant d'une chambre à une autre, l'une d'elles s'accorde une seconde de répit et laisse tomber une phrase : «Il est hors de question de laisser les chambres dans un état pareil, et vous n'avez encore rien vu !» Apparemment, cette situation n'est pas inédite, beaucoup d'occupants partent en laissant derrière eux leurs déchets et leurs poubelles. «A chaque tournée, nous constatons des dégradations multiples : des miroirs cassés, des climatiseurs arrachés, et le mobilier saccagé», déclare le directeur du complexe. Mais selon lui, la situation reste contrôlable, «nous avons un personnel qui s'occupe du nettoyage et des réparations. Les clients sont nos invités, c'est à nous de leur assurer le confort dont ils ont besoin et on ne peut pas leur demander de nettoyer leurs chambres eux-mêmes. Ils sont là pour profiter des vacances et à nous de les servir du mieux qu'on peut», ajoute t-il. Cependant, il pointe du doigt un problème encore plus grave, celui des déchets et ordures qui vous font face à la sortie de la résidence. Effectivement, il suffit simplement de faire quelques pas en direction de la plage pour constater de ses propres yeux. Un phénomène que nous nous permettons d'appeler «phénomène bouteille». Un tas de bouteilles en plastique envahit les alentours. POLLUTION ET MANQUE D'HYGIèNE Les lieux ressemblent beaucoup plus à une station de recyclage qu'à un accès à la plage. Sous l'effet de la curiosité, il fallait patienter pour que le mystère de ce désolant paysage se révèle. L'explication s'offre à nous au bout de quelques minutes d'attente. Ces bouteilles servent, en fait, de moyen de lavage. Les estivants remontant de la plage, les remplissent d'eau de mer et se lavent les pieds avec, pour se débarrasser du sable avant de rejoindre la résidence. Un «rituel» suivi par un lancer de bouteilles impressionnant, à se croire dans une compétition. Plus grave encore, il arrive même que les usagers arrosent le gazon avec de l'eau de mer. Savent-ils seulement à quel point l'eau salée peut être nocive pour les plantes ? Non. Inutile donc de se demander pourquoi le gazon n'est plus aussi vert et que son apparence se dégrade. «Nous avons essayé à maintes reprises de sensibiliser les gens, mais rien n' y fait», affirme Hani Bouam, contrôleur de gestion et d'exploitation à l'unité de Matarès. Malgré la présence de douches où les gens peuvent se laver, les consignes et les 50 poubelles disponibles sur les lieux, la négligence des citoyens prime. «Nous avons eu recours à des indications imagées afin de toucher tout le monde, mais les mauvaises habitudes restent les mêmes et cela nuit à l'image du complexe», précise M. Bouam. Désolantes sont ces images de sachets, de papiers voire même de couches pour bébé éparpillés ici et là. Les espaces carrelés, le sable ou le gazon, aucun endroit n'est épargné. A qui donc la faute ? Il est plus facile d'accabler les responsables des lieux, de les accuser de mauvaise organisation ou de manque d'hygiène. Est-ce seulement vrai ? Si les gens prenaient juste la peine de se remettre en question au lieu de désigner un bouc émissaire, la déception ne serait pas au rendez-vous.