C'est la dernière ligne droite de l'été avant la rentrée sociale. Il serait donc instructif d'effectuer une pause au Bastion 23, situé sur le front de mer au niveau du boulevard Amara Rachid. Le palais des Raïs ou le Bastion 23, a été construit dès le XVIe siècle et s'est agrandi au fil du temps. Le palais des Raïs est connu aussi sous les désignations de qaâ Essour, Bordj Ezzoubia et Topanet des sept cavernes. L'extension de la demeure des Raïs s'est dotée de trois palais, de six maisons, d'un oratoire et d'un sabat (passage couvert). Le Bastion 23 est classé monument historique par l'occupant colonial en 1909 et reconduit le 20 décembre 1967, selon l'ordonnance n° 67-281, en qualité de groupe de maisons mauresques. Il jouit également du rang de patrimoine national en 1991, avant d'atteindre le statut de patrimoine universel en 1992. Le palais des Raïs a subi plusieurs évolutions. Il était d'abord le siège du consulat des Etats-Unis d'Amérique et la résidence du duc d'Aumale pour ne citer que ceux-là. Son squat, opéré par des indus occupants au lendemain de l'indépendance, a duré 24 ans avant que des architectes, soucieux de la défense de cette lustre antique, n'intercèdent en sa faveur auprès des pouvoirs publics sur la nécessité de préserver cette propriété nationale. La visite débute tout d'abord par une leçon d'histoire prodiguée au seuil de la sqifa (hall d'entrée). Un plan d'Alger, dressé à l'échelle 1/10000e, retrace l'historique d'El Djazaïr des Beni Mezghenna, de la période phénicienne, romaine jusqu'à la période berbère. Un autre tableau retrace le parcours de l'Alger ottoman, durant la période de 1816 à 1830, notamment en ce qui concerne les travaux entamés en 1516 et le transfert du centre politico-administratif de la Djenina vers la citadelle située à haute-ville. Le cours d'histoire s'achève par le choc colonial que l'on sait et la démolition des maisons pour ériger en 1845 la statue du duc d'Orléans. Le guide, Mouloud Azzili a bien voulu nous faire une description sommaire des lieux : « L'édification de la résidence des Raïs est fidèle à la reproduction de l'espace intérieur et la conception architecturale d'une habitation algéroise. Le logis se compose de 2 à 3 paliers avec une orée qui donne sur une cour intérieure que l'on appelle wast éddar. » Cet espace est bordé de voûtes à courbures et étayées par des pilastres en marbre de Carrare torsadé. Les paliers supérieurs reproduisent le plan du rez-de-chaussée avec des bioute (pièces), au premier étage ghorfa (chambre), au second étage m'nazeh. L'habitation est protégée par une terrasse stah, réservé essentiellement à la gent féminine. Les joyaux de ce musée restent incontestablement la khaïma (cuisine), le hammam et le brasero. L'artiste plasticien, Ali Grid, et en même temps le conseiller culturel du Bastion 23, dresse les missions que s'est assigné cet établissement : « Le Bastion 23 est avant tout un endroit de lumière et un pole de penchant éducatif. Le Bastion 23 ne cesse de s'embellir à travers les rencontres permanentes des hautes institutions nationales, des représentants étrangers et des citoyens passionnés de découvertes. Notre établissement est ouvert à ceux qui ont en tête la passion de la défense de notre héritage à cœur et ne doit pas tomber dans la léthargie qui caractérise actuellement nos musées. » Cet ancien élève de l'Ecole nationale des beaux-arts s'oppose catégoriquement au caractère léthargique qui dépeint actuellement sur nos musées : « Nous sommes à notre troisième édition de la mosaïque d'Eté. C'est une manifestation estivale à exhortation pédagogique. Le choix de la période des congés n'est pas non plus fortuite, car notre but est d'attirer le maximum de visiteurs, notamment ceux qui foulent pour la première le territoire national. » Une exposition d'art plastique collective est ouverte jusqu'au 15 septembre. Ce témoignage rassemble une pléiade d'artistes venus d'horizons différents, avec chacun sa conception et son savoir-faire. Le Bastion 23 est confronté au regrettable dilemme de rassembler les artistes du terroir. En effet, les artistes tout comme le public se font désirer en dépit de toutes les facilités et les conditions d'accueil.