Le Conseil national de transition libyen siègera, aujourd'hui, et pour la première fois, à la réunion de la Ligue arabe en tant que représentant officiel de la Libye. L'Algérie, qui prendra part à cette réunion, se verra ainsi mise devant le fait accompli de reconnaître le CNT. Un deuxième camouflet après celui infligé par l'ambassade libyenne à Alger qui a hissé le nouveau drapeau libyen sans que l'Algérie ait accordé sa reconnaissance au CNT. Est-ce là l'image de la diplomatie que l'on veut donner à ce pays ? Celle d'un suivisme contraint et forcé ? Celle d'un pays qui ne sait plus quelle attitude adopter avec ses voisins ou avec les bouleversements qui s'opèrent autour de lui ? Au-delà de la reconnaissance ou non du CNT, l'image de la diplomatie algérienne se trouve on ne peut plus entamée, car ne reflétant point les valeurs d'un pays, mais les visées étroites d'un homme ou d'un groupe de personnes. Depuis le début du conflit libyen, le ministère des Affaires étrangères n'a eu pour seule voix que des démentis. Accusé de soutenir El Gueddafi, d'alimenter ses troupes en mercenaires et armements, puis d'avoir accueilli le fuyard El Gueddafi, l'Algérie officielle ne répond que via des mises au point ou démentis. Au lieu de créer des passerelles et d'avoir une voix, nos diplomates semblent préférer la chasse aux dépêches des agences de presse pour leur servir des : «L'Algérie réfute catégoriquement l'information rapportée…» Hier, dans la première déclaration officielle algérienne depuis la prise de Tripoli par les rebelles libyens, le directeur de la communication du ministère des Affaires étrangères soulignait que l'Algérie continue à observer «une stricte neutralité en refusant de s'ingérer, de quelque manière que ce soit, dans les affaires intérieures de la Libye». Une explication bien maigre et peu édifiante, compte tenu de la proximité de ce pays avec l'Algérie. Il s'agit d'un pays voisin avec lequel une frontière, longue de 982 km, est partagée. On se demande ce que fera Mourad Medelci de cette «stricte neutralité», quand il se retrouvera autour de la même table avec la nouvelle représentation libyenne. Va-t-il demander la présence de l'autre partie en conflit pour pouvoir préserver cette neutralité pourtant compromettante ? La confortable doctrine de «soutien aux Etats et pas aux régimes», claironnée depuis le début des révoltes arabes par les officiels algériens dans le peu de déclarations qu'ils daignent faire, ne fait plus recette. Elle équivaut même à une sorte de compromission avec les régimes en sacrifiant les intérêts de l'Algérie. La diplomatie algérienne est aujourd'hui dans ses petits souliers, mise dans la gêne, décriée, et pis encore susceptible d'attirer des hostilités, dont on se passerait volontiers, à nos frontières. On ne peut confondre les intérêts d'un Etat avec ceux des personnes. Une diplomatie qui crée des hostilités au lieu de les éviter n'en est plus une.