Le départ à la retraite des anciens agriculteurs a scellé le sort de ce domaine, dont les surfaces ont été cédées en exploitations individuelles. Si le phénomène est partout visible dans le pays, à l'ex-domaine socialiste, Kherrab Abdelmadjid, à la périphérie de la ville d'El Milia, l'inexorable avancée du béton a fait perdre la vocation agricole à la ferme. Les villas somptueuses, construites sur des terres agricoles, côtoient la misère des maisonnettes habitées par les familles d'anciens fellahs, ou vendues à des gens fuyant le terrorisme du milieu des années quatre vingt dix. Jadis prospère, à l'agriculture florissante, la ferme n'est plus que l'ombre d'une époque. Les étables d'élevage bovin dans lequel elle s'est spécialisé ne sont plus que des hangars abandonnés à l'usure du temps. Les vastes superficies ne produisent plus les succulentes pastèques ou les pommes golden à peau jaune et à la chaire juteuse, ni même ces produits maraîchers qui ont fait la notoriété du domaine. Tout a été dilapidé, vendu ou carrément loué à des sous-traitants véreux. Certains propriétaires d'exploitation agricole individuels (EAI) sont entrés en justice avec des personnes auxquelles ils se sont associés. La misère est le maître mot dans ce domaine, crée au lendemain de l'Indépendance pour être géré par des anciens moudjahidine. La réforme agraire du défunt président Houari Boumediene a rendu davantage de dignité aux fellahs qui l'ont fait prospérer grâce à la seule force de leur bras, mais depuis la fin des années mille neuf quatre vingt dix, la misère a reconquis les lieux. Les terres ont été abandonnées et les agriculteurs ont tourné le dos à leur labeur. Le départ à la retraite des moudjahidine a scellé le sort de ce domaine lorsque ses surfaces ont été cédées en exploitations individuelles (EAI) ou collectives (EAC), à la faveur de la réforme des années mille neuf cent quatre vingt. L'abandon de la terre et la dilapidation du matériel agricole et de tout le cheptel bovin, ont définitivement fait perdre toute vocation à cette ferme. L'émergence de la nouvelle mentalité du béton l'a fait basculer dans l'anarchie et la misère. Juste à côté, des garages et des hangars à usage commercial, ainsi que des villas, ont poussé comme des champignons, car de vastes parcelles de terrain ont fait l'objet d'un détournement au vu et au su des autorités. Les services de l'agriculture crient au scandale, sans trop dissuader l'empiétement du béton sur les terres fertiles de ce domaine. Une source au fait de ce dossier assure même que le laxisme qui est de mise à encourager d'autres à faire preuve de plus d'audace dans cette agression en règle contre ce riche patrimoine agricole. Elle déplore que le phénomène ne concerne pas uniquement la ville d'El Milia, mais, a-t-elle soutenu, touche également la commune de Settara.