L'alphabétisation ne semble pas figurer parmi les priorités des pouvoirs publics dans la wilaya de Constantine. Plusieurs indices l'attestent déjà. La journée arabe d'alphabétisation célébrée le 8 janvier de chaque année est passée dans l'anonymat total. Hormis une journée d'information et de sensibilisation organisée par l'association El Irshad ouel Islah, rien n'est venu rappeler un quelconque intérêt porté à ce fléau des temps modernes. Pourtant, la situation dans la wilaya de Constantine demeure de mauvais augure sachant que le nombre des analphabètes est de 136 722, selon les estimations de l'année 2004, cela sans tenir compte du nombre important des élèves qui abandonnent les classes de cours dès la fin du premier palier surtout pour les filles dans les localités pauvres et éloignées de la wilaya. Sur un taux avoisinant 22% à l'échelle nationale, ce qui est déjà énorme, le nombre des inscrits aux cours d'alphabétisation ne dépasserait pas 3200 élèves, soit un taux de 3% dans le meilleur des cas, selon les statistiques de l'association Iqra, qui semble combattre seule sur le terrain en l'absence d'une stratégie nationale claire en la matière, sachant que la commune de Constantine a délaissé depuis longtemps cette mission qui relève pourtant des pouvoirs publics. Depuis mars 2005, l'association nationale d'alphabétisation Iqra, présente à Constantine depuis 1990, éprouve d'énormes difficultés pour mener tant bien que mal sa mission et faire face à une situation de mutisme étrange de la part des autorités de la wilaya de Constantine. En dépit d'énormes sacrifices consentis durant des années, le bureau de Constantine de l'association Iqra s'est vu supprimer les contrats d'emploi de 40 enseignants dont la plupart sont des filles en poste depuis des années. La décision émanant du ministère de l'Emploi et de la Solidarité ayant trait à la réduction des postes octroyés dans le cadre de l'emploi de jeunes a été qualifiée par un responsable de l'association de mesure qui n'a d'autre finalité que de gonfler encore plus le nombre d'analphabètes à Constantine. Elle risque d'ailleurs de compromettre sérieusement le programme d'enseignement pour plus de 1600 inscrits. Même si les enseignants licenciés ont fait preuve d'un civisme exemplaire en décidant d'assurer leurs cours grâce aussi à une solidarité inespérée de leurs collègues, la situation n'est pas pour durer aussi longtemps, surtout qu'aucune réaction n'a été manifestée ni du côté de la municipalité ni de la part de la wilaya. Il est utile de noter que le centre d'alphabétisation de la wilaya de Constantine compte après ces licenciements une centaine d'encadreurs recrutés dans le cadre du filet social et l'emploi des jeunes, exerçant pour des salaires insignifiants pour des diplômés universitaires, dont certains assurent des cours dans des lieux éloignés du chef-lieu de wilaya et n'arrivent même pas à couvrir leurs frais de transport. Le départ pour différentes raisons des compétences avérées, résultat d'une négligence involontaire ou délibérée, demeure une véritable hémorragie pour l'association Iqra qui ne désespère pas et compte toujours sur un soutien du wali de Constantine pour ouvrir de nouvelles classes pour des populations en quête de savoir.