De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed D�cid�ment, �a n�arr�te pas. Chaque semaine am�ne son lot d�affaires de trafics de gros sous � l�odeur naus�abonde et dans lesquelles le pouvoir actuel en place dans l�Hexagone est pour le moins �clabouss�. Nicolas Sarkozy, de plus en plus impliqu� dans cette succession de scandales, s�est fendu jeudi d�un communiqu� qui l�enfonce encore plus et r�v�le des connivences au plus haut niveau de l�Etat. La mise sur �coute par les juges de l�affaire Karachi de Brice Hortefeux, ami du chef de l�Etat, resserre encore l��tau autour de Sarkozy. C�est une liste d�affaires � la Pr�vert : il y a d�abord eu l�affaire Christine Lagarde (du temps o� elle assurait le porte-feuille de l��conomie) et les 285 millions d�indemnit�s octroy�s par le tribunal arbitral � Bernard Tapie et sur lesquels l�ancienne ministre s�est refus�e � faire appel de cette colossale indemnit�. Lagarde n�aurait jamais agi seule, disent les commentateurs, sans les consignes de Sarkozy pour aider son ami Tapie. Puis, l�affaire Bettencourt et les enveloppes qu�aurait distribu�es la milliardaire propri�taire de l�Or�al � des politiques, dont Sarkozy. Dans cette affaire, toujours en cours, la juge Pr�vost-Desprez, en charge de l�affaire, se voit bouscul�e par le procureur Philippe Courroye, proche de l�Elys�e. Autre tr�s proche de Sarkozy, l�ancien ministre Eric Woerth impliqu� dans l�affaire Bettencourt mais aussi dans celle de la vente d�un champ de course � Compi�gne et pour lequel il est sous le coup d�une enqu�te pour �prise ill�gale d�int�r�t �. Li�e toujours � l�affaire Bettencourt, il y a l�histoire des �fadettes�, ces factures t�l�phoniques d�un journaliste du Monde qui enqu�tait sur l�affaire de la milliardaire et qui avaient �t� �pluch�es par le directeur de la police nationale, ami de Sarkozy, et ce, en d�pit et en violation de la loi sur les interceptions de s�curit� et de celle du secret des sources des journalistes. Apr�s les fadettes, ce sont les mallettes de la R�publique qui s�invitent dans les affaires : il s�agit, selon les r�v�lations tr�s tardives de Robert Bourgi, un pilier de la Fran�afrique (voir papier dans le Soir d�Alg�riedu 13 septembre), de valises bourr�es d�argent offertes par des chefs d�Etat africains remises par Bourgi, � Chirac et Villepin pour financer la campagne de Chirac en 2002. Ces r�v�lations tardives de Bourgi et son insistance � mettre hors de cause Sarkozy �qui aurait fait cesser cette valse de mallettes� sont consid�r�es comme un �cran de fum�e destin� � masquer d�autres turpitudes. Elles sont contredites dans l�enqu�te de Pierre P�an dans son livre Les mallettes de la R�publique (�ditions Fayard septembre 2011). Selon beaucoup d�observateurs, ces r�v�lations auraient m�me �t� sugg�r�es par l�Elys�e, qui allait se voir �clabouss� dans une affaire beaucoup plus grave encore, celle de Karachi, cauchemar de Sarkozy. Sarkozy �clabouss� L�affaire de Karachi est aujourd�hui au c�ur de ce qui est devenu un scandale d�Etat qui a engendr� mort d�hommes et qui a amen� d�s jeudi Sarkozy � des r�actions de panique, tr�s impulsives, non contr�l�es et qui risquent de l�enfoncer davantage. Qu�est-ce que l�affaire Karachi ? Sans entrer dans les d�tails, il faut rappeler que le 8 mai 2002, un attentat � Karachi, au Pakistan, a fait 14 morts, dont 11 Fran�ais de la Direction des constructions navales, en mission pour finaliser la mise en service des sous-marins vendus au Pakistan par la France. Si dans une premi�re phase l�enqu�te s��tait orient�e vers un attentat terroriste, tr�s vite, les juges ont commenc� � fouiller dans l�aspect financier du contrat des sousmarins. Aujourd�hui, il est av�r� que des commissions ont �t� vers�es au Franco-libanais Ziad Takieddine. Ce dernier, homme d�affaires sulfureux, interm�diaire dans ce dossier comme dans celui de la vente de fr�gates � l�Arabie saoudite et aussi dans les tractations avec la Libye pour la vente d�armes apr�s la lev�e de l�embargo militaire en 2004, aurait revers�, dans l�affaire de Karachi, mais pas seulement, une partie des commissions qu�il a re�ues, pour la campagne pr�sidentielle d�Edouard Balladur. Lorsque Chirac est arriv� au pouvoir, il a d�cid� de l�arr�t de ces commissions (l�gales jusqu�en 2000) et ce serait l�arr�t de ces commissions qui constituerait le mobile de l�attentat, venu en repr�sailles � cette fin de pots-de vin bien juteux. Mais au-del�, plus que les commissions, ce sont les r�tro-commissions � celles-ci interdites depuis toujours � qui int�ressent les juges en charge de l�affaire. L�homme d�affaires Ziad Takieddine vient d��tre mis en examen pour complicit� et recel d�abus de biens sociaux dans cette affaire Karachi et la justice continue d�enqu�ter sur le financement de la campagne de Balladur. Dans ce contexte, des perquisitions op�r�es cet �t� et un t�moignage viennent corroborer les soup�ons des juges et pr�cipiter l�affaire Karachi, le t�moignage est celui de l��pouse de Thierry Gaubert. Pr�cisons d�abord qui est ce monsieur Gaubert. Fid�le de M. Sarkozy depuis les ann�es 1980, lorsque l�actuel chef de l�Etat devient ministre du Budget, Gaubert devient son charg� de mission aux c�t�s de Brice Hortefeux, directeur de cabinet, et forment � deux la garde tr�s rapproch�e de Sarkozy et c�est ce dernier qui maria Gaubert � celle qui a fait les r�v�lations fracassantes. Selon le Nouvel Observateur, elle aurait d�clar� aux enqu�teurs �qu�elle se souvient tr�s bien que son mari, dont elle vient de se s�parer dans des conditions tumultueuses, a effectu� plusieurs voyages en Suisse, fin 1994-d�but 1995, avec Ziad Takieddine et Nicolas Bazire, alors directeur de cabinet de Balladur � Matignon�. Plus pr�cise encore, elle affirme qu�elle �les a vus revenir avec de volumineuses valises de billets�. Nicolas Bazire est, pour comprendre l�encha�nement, selon le portrait qu�en fait le journal le Monde�� la fois ami et conseiller� de Sarkozy et t�moin de son mariage avec Carla Bruni. Au moment de l�affaire Karachi, Bazire est le directeur de campagne de Balladur et Sarkozy son porte-parole. Les deux hommes � Gaubert et Bazire, viennent d��tre mis en examen. Leur proximit� avec le chef de l�Etat est tr�s forte. Dans ces conditions et eu �gard au r�le capital qu�ils jouaient avec Sarkozy, il va �tre difficile � ce dernier de faire croire qu�il n��tait au courant d�aucune r�trocommission. Et pourtant, il s�est fendu jeudi, alors qu�il se trouvait � New York, d�un communiqu� qui n�est pas fait pour lever tout soup�on. Panique � l�Elys�e et �coutes t�l�phoniques de Hortefeux �difiantes Que dit le communiqu� de la pr�sidence de la R�publique que nous avons re�u ? Textuellement ceci : �M. Nicolas Sarkozy n�a jamais dirig� la campagne de M. Balladur ; il n�a jamais exerc� la moindre responsabilit� dans le financement de cette campagne. Il en �tait le porte-parole ; s�agissant de l�affaire de Karachi, le nom du chef de l�Etat n�appara�t dans aucun des �l�ments du dossier. Il n�a �t� cit� par aucun t�moin ou acteur de ce dossier. Il y est donc totalement �tranger d�autant plus qu�� l��poque o� il �tait ministre du Budget, il avait manifest� son hostilit� � ce contrat comme cela appara�t dans les pi�ces de la proc�dure. Les familles des victimes de l�attentat de Karachi ont droit � la v�rit� et au respect de leur souffrance ; tout le reste n�est que calomnie et manipulation politicienne.� Les explications donn�es par la pr�sidence sont trop courtes, pour ne pas dire qu�elles traduisent �la panique � bord�. Mieux encore, lorsque l�Elys�e affirme que �le nom du chef de l�Etat n�appara�t dans aucun des �l�ments du dossier� et �qu�il n�a �t� cit� par aucun t�moin ou acteur du dossier�, une question se pose : comment l�Elys�e peut-il faire cette d�claration alors que l�galement n��tant pas partie civile, ni le pr�sident ni la pr�sidence n�ont le droit d�acc�s au dossier. Alors que beaucoup s�interrogent sur ces d�clarations de l�Elys�e, le site du journal le Monde r�v�lait hier matin le contenu d��coutes t�l�phoniques pour le moins fracassantes et qui mettent en cause le tr�s proche de Sarkozy et ex-ministre de l�Int�rieur, Brice Hortefeux, qui ne se savait manifestement pas sur �coutes. Le 14 septembre, soit quelques jours apr�s la d�position de l�ex-femme de Gaubert, Hortefeux appelle sur son portable Thierry Gaubert et lui dit ceci pour le mettre en garde contre sa femme : �Elle balance beaucoup apparemment H�l�ne� et son interlocuteur de r�pondre : �qu�est-ce que tu as comme info l�-dessus, toi, parce qu�elle me dit qu�elle dit rien�. Et l�ancien ministre de l�Int�rieur de r�pondre : ��a m�emb�te de te le dire par t�l�phone� il y a beaucoup de choses, hein.� Voil� o� l�affaire d�Etat en est. Ce n�est pas tr�s brillant. M�me si Sarkozy est prot�g� pour l�heure par son immunit� en tant que pr�sident de la R�publique et ne pourra donc pas �tre entendu par la justice, les r�v�lations de cette affaire sont scandaleuses et questionnent sur les chances qui lui restent � briguer un second mandat.