Après 30 ans dans les seconds rôles, Djamel Bounab vient, enfin, d'être distribué comme tête d'affiche d'une série de douze parties sur la vie de Rachid Ksentini. Ce n'est que justice rendu au débonnaire Djamel Bounab qui dit n'avoir aucun complexe d'avoir collé, à ses débuts, aux basques des réalisateurs pour obtenir un petit rôle. Il n'y pouvait rien, il adore le cinéma. Djamel Bounab, l'éternel second rôle. Cela ne t'agace pas un petit peu ? Il y a un instant, en franchissant le seuil de la Maison de la presse pour venir chez vous, une jeune fille m'interpelle et me lance : « C'est pour quand le premier rôle ? » C'est dire que ce statut, si j'ose le qualifier ainsi, agace aussi le public. Mais comme dit le proverbe « A quelque chose malheur est bon », j'essaie de prendre cela du bon côté. Après tout, si les gens m'apostrophent pour me faire ce genre de remarque, c'est qu'ils me connaissent assez bien. Le fait d'être distribué, presque toujours dans les productions télévisuelles et même cinématographiques, même en tenant les seconds rôles, m'a permis de faire un nom. Ma tête est désormais familière chez le public algérien. Cela fait quand même trois décennies que tu aspires à voir ton nom en haut du générique !? Depuis 1975, effectivement. Ce fut l'année, où, à 18 ans, j'intègre la troupe du regretté Hassan Hassani (Boubagra). Ammi Hassen dirigeait à l'époque une compagnie théâtrale avec les regrettés Tayeb Abou El Hassen et Mustapha El Anka. Il ne m'a pas fallu beaucoup pour être accepté. Une chansonnette comique d'Amar Ouhadda et un monologue improvisé tout aussi rigolo étaient suffisants pour Hassen El Hassani pour m'engager illico presto dans un sketch intitulé Boubagra imam. S'ensuivent des dizaines de pièces dans lesquelles j'ai tenu des rôles. Hassen El Hassani reste sans conteste mon cheikh dans le domaine du théâtre et de la comédie. Et avant d'affûter tes armes chez Boubagra ? Comédien de naissance. Je sais que c'est redondant pour vous les journalistes. Vous n'entendez que cela, notamment de la part des autodidactes comme moi. Croyez-moi, c'est la vérité. Je me suis frotté dès ma tendre enfance à la chorale, au chant andalou, au conservatoire et au théâtre amateur. J'avais ce don d'attirer l'attention lorsque je mimais Rouiched, Ouenniche, Touri et d'autres comédiens aujourd'hui disparus. C'est vrai que tu collais aux basques des réalisateurs pour obtenir un rôle ? Oui, c'est vrai, et je n'ai aucun complexe à l'avouer, car j'aime beaucoup le cinéma. Vers la fin des années 1970, lorsque j'entendais dire qu'il y a un film en chantier, je me précipitais vers le réalisateur pour me prendre dans son équipe. La plupart m'éconduisaient avec gentillesse. D'autres m'ont fait confiance, comme Rabah Laradji qui m'a distribué dans Un Toit une Famille dont le premier rôle est assuré par Fouzi Saïchi. C'était en 1980 et c'est le déclic. Je serai sollicité ensuite par Ghouti Bendeddouche, en 1988, dans Hassen Nia et, dans la même année, par Abdelkrim Baba Aïssa dans Sous la cendre. Il y eut encore le film sur Djalti de Djamel Fezzaz, Lumières de Jean-Paul Lièdo. Mais c'est Djamel Fezzaz, que Dieu ait son âme, que je considère comme le père du « mouselsel » algérien qui m'a propulsé au devant de la scène. C'est lui qui m'a aidé à me faire un nom grâce à ses feuilletons. Il a toujours fait appel à moi. Et enfin, le premier rôle avec la série sur Rachid Ksentini ! Je remercie énormément Boualem Aïssaoui de m'avoir donné cette occasion. Oui enfin ! Après 30 ans d'attente. Tu n'as pas connu Ksentini, pas d'enregistrement filmé le concernant. Il n'était pas facile d'être dans la peau du personnage... Une lourde responsabilité en ce sens qu'il s'agit d'un ténor du théâtre tragi-comique, surnommé à juste titre d'ailleurs le Charlot algérien. Pour être fidèle à la réalité, je me suis rabattu sur les mimiques de Rouiched. Car Rouiched était tellement épris de Ksentini qu'il l'a carrément imité. C'est en hommage à Rachid Ksentini qu'il a d'ailleurs choisi le sobriquet de Rouiched, un diminutif de Rachid.