C'est devenu presque une tradition : à chaque Aïd El Adha, un rituel est religieusement respecté. Alger se transforme en une ville morte, pour ne pas dire déserte, où des « âmes en peine » traînent leur silhouette. Les boutiques sont restées fermées. Seules quelques gargotes n'ont pas baissé rideau pour la circonstance, mais même là, il n'y avait pas une quantité suffisante de pain. Les casse-croûte disponibles ont été consommés dare-dare ainsi que les triangles de pizza. Alors, on ne proposait que quelques gorgées de limonade. L'appel lancé par l'Union générale des commerçants et des artisans algériens (UGCAA) afin de répondre à la demande des citoyens en ces journées de fête est tombé dans l'oreille d'un sourd. La capitale était si déserte que le cinéaste Steven Spielberg pouvait même venir y tourner un film sur la désolation ou le chaos. Le décor était planté. Les citoyens ont dû parcourir plusieurs kilomètres pour trouver où acheter les produits les plus nécessaires tels le pain et les produits alimentaires. Alger-Centre, Bab El Oued, El Biar, place du 1er Mai, on retrouve le même cadre. Seules des ribambelles d'enfants mettent un peu de couleurs et apporte une petite note de gaieté. L'Aïd, c'est un peu la fête des enfants. Loin de leur univers candide, les adultes ont de petits soucis. Ils doivent se ravitailler et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils n'ont pas l'embarras du choix. Les uns sont contrariés, scandalisés, au bord de la crise de nerf gesticulant dans tous les sens. Les autres sont moins surpris, entièrement résignés et prennent la chose avec une certaine fatalité. « Nous n'avons pas le même rapport au temps que les autres nations et puis, il faut dire que ce n'est pas la première fois que cela arrive. A chaque Aïd El Adha, les autorités préconisent d'assurer au moins un minimum de service public, mais les commerçants n'en font qu'à leur tête », a affirmé Mohamed, un jeune qui semble désorienté en cette journée de fête. Par contre, il y a ceux qui ont profité de la situation tels les chauffeurs de taxi et les clandestins qui jettent leur appât et attendent que l'hameçon morde. Leur cible : les pères de famille accompagnés de leur épouse et des enfants. Ceux-ci leur déclarent même qu'ils sont disposés à « leur faire un prix ». Les taxiphones n'ont pas chômé et quelques cybercafés ont permis à certains accros du Net de se sentir moins seuls.