L'Algérie doit encourager le développement de l'énergie solaire. «Elle a les capacités de le faire. Il faut peut-être penser à laisser les réserves de pétrole et de gaz pour les générations futures», a déclaré, dimanche soir au Centre culturel français (CCF) à Alger, le climatologue et le glaciologue Jean Jouzel, prix Nobel de la paix 2007 avec le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC) de l'ONU, lors d'une conférence sur «Le changement climatique».Il a indiqué que le solaire est une énergie propre, tout comme l'éolien ou le marin. L'Algérie, pays marin, venteux et semi-désertique, a des potentialités de produire ces énergies renouvelables et peu polluantes. Les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) n'aident pas, selon lui, à lutter contre le réchauffement climatique, phénomène de plus en plus perceptible. Aussi, a-t-il proposé la création d'une organisation mondiale de l'environnement qui aura des droits équivalents à ceux de l'OMC. Jean Jouzel fait partie de l'école qui attribue le réchauffement climatique plus à l'activité humaine qu'à l'activité solaire. Celle-ci est en légère baisse. Il a rappelé que l'oxyde d'azote, le méthane, le gaz carbonique et l'ozone sont des gaz à effet de serre (absorption d'une partie du rayonnement solaire réfléchi par le sol). Autrement dit, la chaleur piégée grâce à ce phénomène naturel permet l'existence d'une température vivable sur la surface de la Terre. Sans cela, l'eau sera gelée et le cycle de vie s'arrêtera. «Par notre activité humaine, nous sommes en train d'augmenter l'effet de serre et d'accumuler la chaleur dans les basses couches de l'atmosphère. Nous avons alors 1% de plus chaleur et 40% de gaz carbonique que il y a 200 ans. Le réchauffement climatique est sans équivoque mais n'est pas homogène. Il est plus marqué sur les continents que sur les océans. Pour l'Europe et le Maghreb le réchauffement est supérieur à 1 degré. Pour l'Arctique, ce réchauffement est deux fois plus rapide qu'ailleurs», a-t-il dit. Il a relevé que grâce à l'étude des glaciers, ces cinquante dernières années, les scientifiques ont pu remonter jusqu'à 800 000 ans et mieux découvrir ainsi la variation de la composition de l'atmosphère. Selon lui, le 1% de hausse peut passer à 2 et 3% à la fin de ce siècle. Il a relevé qu'en raison du réchauffement climatique, il y a plus de vapeur d'eau dans l'atmosphère qu'il y a vingt ans. La vapeur d'eau est considérée comme l'un des principaux facteurs amplifiant l'effet de serre. Il y a plus de vapeur Il a indiqué que la superficie minimale des glaciers diminue chaque année dans l'Antarctique, ce qui augmente également le réchauffement climatique. A presque 60%, l'effet de serre serait dû à l'utilisation des combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon). La déforestation est à l'origine à 10% de ce phénomène. Il a indiqué que la Chine a dépassé les Etats-Unis en termes d'émission annuelle en tonnes de gaz carbonique (CO2) par habitant. Cette émission est en augmentation régulière aux Emirats arabes unis depuis 2003. «Pour la France, 6 tonnes de CO2 sont émis chaque année par chaque habitant. Pour l'Algérie, cela va de 1 à 2 tonnes», a-t-il précisé. Le scientifique a indiqué que les marais, les décharges d'ordures et les panses des ruminants produisent du gaz méthane qui participe au réchauffement climatique. Jean Jouzel a indiqué que 2010 a été l'année la plus chaude que l'humanité n'ait jamais connue. «Les glaciers fondent et l'eau va dans l'océan. Cela provoque l'élévation du niveau de la mer. Celle-ci est également provoquée par le réchauffement de l'océan», a-t-il noté. Il a plaidé pour le traitement du réchauffement climatique à la racine pour mieux lutter contre la famine et entretenir la biodiversité. Actuellement, Jean Jouzel est directeur de recherche au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) en France.