Le dossier syrien pourrait bien entraîner un bras de fer entre la Russie et la Turquie. Alors que Moscou a, une nouvelle fois, insisté hier sur la nécessité de trouver règlement pacifique à la crise, Ankara ne désespère toujours pas de parvenir à convaincre la communauté internationale d'intervenir d'une manière ou d'une autre en Syrie. En tout cas, le gouvernement turc voit dans la question des réfugiés syriens un argument «valable» pour être présent physiquement sur le territoire syrien. La Turquie accueille déjà dans sa province frontalière de Hatay environ 7500 Syriens qui ont fui la crise. A ce propos, le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a indiqué qu'il pourrait prendre des mesures face à l'afflux de milliers de réfugiés vers la frontière turque. «Nous travaillons sur tous les scénarios (...) Si des milliers de gens fuyaient vers notre frontière, cela créerait une situation différente. Des mesures pourraient être prises avec la communauté internationale», a-t-il dit en réponse à une question concernant l'éventualité d'une zone tampon. Plus tôt dans la journée, la Russie avait insisté sur une résolution pacifique de la crise en Syrie, appelant à prendre pour exemple le Yémen où un plan de règlement pacifique a été signé grâce à la patience et à la persévérance de la communauté internationale. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, - dont le gouvernement n'a visiblement pas apprécié la décision de la Ligue arabe d'infliger des sanctions économiques à Damas - a ainsi appelé à «cesser d'agir avec des ultimatums et d'oeuvrer pour ramener la situation sur le terrain politique», en soulignant la nécessité de résoudre pacifiquement la crise syrienne. Dans une déclaration citée par l'agence de presse Interfax, M. Lavrov a dans ce sens cité comme exemple le Yémen où un plan de règlement pacifique de la crise, proposé par le Conseil de coopération des Etats du Golfe (CCG), a été signé après des mois de tractations. Selon lui, «une telle approche est nécessaire pour le problème syrien, car les ultimatums auxquels ont recours quelques Etats, en particulier la Ligue arabe, ne résolvent pas ce problème», appelant également les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) à cesser les appels répétés à mettre fin immédiatement aux violences.
Pékin accordera une attention particulière à la Syrie La Russie n'est pas le seul pays à défendre une telle position. La Chine a également appelé hier les organisations internationales, notamment le Conseil des droits de l'homme (CDH) des Nations unies, à jouer un «rôle constructif dans l'apaisement de l'agitation actuelle» en Syrie. L'appel de Pékin est intervenu après la publication, lundi, par la Commission d'enquête internationale indépendante sur la Syrie, d'un rapport accusant le gouvernement syrien d'avoir violé les droits de l'homme, alors que la Syrie défend sa gestion de la situation, en annonçant que des groupes armés étaient responsables de la violence dans le pays. La Chine a lancé un appel «pour mettre fin aux violences et lancer un processus politique inclusif et équilibré le plus tôt possible, et à rétablir la stabilité et l'ordre du pays», a ainsi fait savoir le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hong Lei. Le même responsable a ajouté que la Chine allait accorder une attention particulière aux développements de la situation en Syrie. La Ligue arabe avait, rappelle-t-on, adopté dimanche des sanctions économiques contre la Syrie, les premières de cette ampleur à l'encontre de l'un de ses membres, pour la contraindre à faire cesser les violences. De son côté, l'Organisation de la coopération islamique (OCI) tiendra aujourd'hui à Jeddah, en Arabie Saoudite, une réunion d'urgence au niveau des ministres des Affaires étrangères des Etats membres pour évaluer la situation de crise que traverse la Syrie depuis mars dernier. La réunion du comité exécutif de l'OCI, au siège de l'organisation à Jeddah, sera consacrée à «l'examen d'un éventuel élargissement des sanctions adoptées par la Ligue arabe contre le gouvernement syrien». La même source a ajouté que 57 Etats membres avaient été invités à prendre part à cette réunion, qui verra la participation du ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem. Entre-temps, Riyad a appelé ses ressortissants à quitter la Syrie. A rappeler que le comité exécutif de l'OCI comprend l'Arabie Saoudite, le Sénégal, l'Egypte, la Malaisie, le Kazakhstan, Djibouti et le Tadjikistan. Depuis la mi-mars, la Syrie est secouée par un mouvement de contestation du président Bachar Al-Assad. Selon l'ONU, les manifestations, souvent marquées par des violences, auraient déjà fait plus de 3500 morts. Damas, qui attribue ces violences à des groupes armés voulant déstabiliser le pays, a fait état de son côté de 1800 morts, pour la plupart des militaires.