Pour les douaniers, tout le monde ou presque est impliqué dans la contrebande et «il est très difficile d'accomplir une mission comme la nôtre en raison de la complicité des habitants de part et d'autre de la frontière où le renseignement ‘travaille'. Il arrive souvent que nos éléments fassent l'objet de filature par les contrebandiers», a indiqué un jeune inspecteur qui semble déterminé à mettre à profit les techniques de lutte contre la contrebande et le crime organisé aux frontières auxquelles l'ont initié les Douanes coréennes lors de ses 18 mois de formation. Car en la matière, leur institution s'est attirée une reconnaissance internationale en matière de protection des frontières, de par la politique axée sur le renseignement mise en place ces dernières années, précisera l'officier. La motivation qui l'anime, arrivera-t-elle elle à aider à en finir avec un fléau dont l'impact direct sur l'économie locale et même nationale commence à peser lourd ? La question mérite d'être posée lorsqu'on sait que le secteur agricole ainsi que celui des entreprises sont devenus la cible privilégiée des contrebandiers. La raison ? Voyant l'étau se resserrer autour d'eux pour ce qui est des autres modes opératoires, la vigilance étant accrue des douaniers au niveau des deux postes frontaliers, Hdada et Ouled Moumen, ces derniers ont pu dégotter un autre filon : les autorisations de circuler dont peuvent disposer les agriculteurs et entrepreneurs pour la détention et le transport de carburants dans des fûts, lesquels sont strictement interdits, sauf pour les agriculteurs et les entreprises. L'attribution de ce désormais «précieux» document est du ressort exclusif des services des Douanes. Ces derniers, ont réussi à déjouer plusieurs manœuvres tendant à exporter de manière frauduleuse d'importantes quantités de gasoil via la bande frontalière. Le nouveau subterfuge utilisé ? Les contrebandiers achètent les fûts de 200 litres de carburant aux agriculteurs qui les déchargent, à l'abri de tout regard, au niveau des communes frontalières, pour faciliter leur acheminement vers les acheteurs tunisiens. Ce qui a emmené les douaniers à devenir de moins en moins généreux et de plus en plus défiants à l'égard des travailleurs de la terre. En atteste le nombre d'autorisations délivrées cette année par rapport à celui 2010 : 3200 de janvier à novembre 2011 contre 5000 durant toute l'année 2010. Et, malgré les lourdes amendes infligées à l'encontre –10 fois la valeur de la marchandise - et la saisie du moyen de transport tel que le prévoit l'ordonnance 05-06 du 25 août 2005 relative à la lutte contre la contrebande, ils ne semblent pas près de lâcher prise. Les 13 820 litres de gasoil et 2020 litres d'essence saisis de janvier à octobre 2011 et les 48 affaires mises au grand jour confortent ce constat. D'où le renforcement en moyens de contrôle tels que la mise en place imminente de quatre nouveaux postes de surveillance, deux à El Hdada et deux à Aïn Zana. «Nous avons un immense territoire difficile à couvrir eu égard à la fréquence et la recrudescence des contrebandiers. Pour nous, il s'agit de veiller à tout mouvement suspect. Il est vrai que la région est traversée par toutes sortes de trafiquants, mais en raison de la situation chez nos voisins, la prédominance est actuellement à la contrebande de gasoil», a indiqué M. Benhacine, chef d'inspection divisionnaire des Douanes Souk Ahras. A ce propos, celui-ci a déploré l'absence d'instrument juridique à même de permettre à ses brigades mobiles l'interpellation des autres «fraudeurs». Ceux qui utilisent leur propre véhicule dans le trafic de carburants, c'est-à-dire le citoyen lambda dont on peut relever, mais ne pas attester le penchant pour la contrebande. Le responsable a, en outre, tenu à souligner la dangerosité des réseaux de trafiquants en évoquant les cas d'attaque et d'agression violentes parfois criminelles dont ont été victimes nombre de ses éléments.