Le président de la Société algérienne de neurologie, le Pr Sidi Saïd, neurochirurgien à l'hôpital de Bab El Oued, insiste, dans cet entretien, sur la prévention de ces malformations, avant même la conception du bébé. Pour lui, l'apport vitaminique chez la femme enceinte est très important. Il recommande la prise d'acide folique un mois avant la conception du bébé. -Les malformations fœtales semblent être importantes en Algérie. Certaines d'entre elles peuvent être prises en charge in utero. Qu'en est-il en Algérie ? La chirurgie anténatale n'est pas encore pratiquée dans notre pays. C'est un concept thérapeutique récent sujet à controverses et nécessitant pour sa réalisation des indications spécifiques et de gros moyens techniques. Le problème dans notre pays réside actuellement essentiellement dans la maîtrise de la démographie, l'amélioration des soins de base, le dépistage, la prévention et la prise en charge précoce des malformations congénitales. Nous estimons à près de 860 000 le nombre de naissances par an… et une occupation des lits de l'ordre de 100% au niveau des services de maternité (avec une moyenne de 12 000 accouchements par service) et… une progression annuelle de 3 à 4% ! Si des efforts ont été consentis, notamment dans la prise en charge des principales causes de mortalité infantile (infections néonatales, diarrhées et déshydratation, broncho-pneumopathies et infections respiratoires…), le taux de mortalité infantile demeure encore élevé, il est actuellement de 24,8 /1000 naissances et les malformations congénitales, notamment celles qui touchent le SNC (Système nerveux central), constituent une des étiologies principales. -Les malformations neurologiques seraient classées en tête, selon des études réalisées par des spécialistes, et leur prise en charge est très lourde. Qu'en pensez-vous ? En effet, contrairement aux données rapportées par des équipes occidentales, les malformations du système nerveux central (notamment les anomalies de fermeture du tube neural) sont, selon certaines études rapportées par nos collègues algériens (Oran et Alger), les plus fréquentes et constituent une des principales causes de mortalité infantile et fœtale et une cause majeure de morbidité et de handicap. Le traitement, pluridisciplinaire, est complexe, long et onéreux contrastant avec le coût de la prévention. Celle-ci consiste en l'administration de suppléments vitaminiques, en l'occurrence les folates (ou acide folique) à toutes les femmes désireuses de grossesse (un mois avant la conception et durant les trois premiers mois de la grossesse). Il faut savoir que ce complexe vitaminique intervient dans la formation et le développement du SNC que les besoins nutritifs sont d'autant plus grands pendant la grossesse et que 25% des femmes enceintes ont une carence clinique ou infraclinique en folates. Aussi, nous estimons qu'un programme de prévention doit être élaboré. En somme, la prévention, le dépistage et le diagnostic anténatal paraissent de réalisation simple en théorie mais très difficiles en pratique pour des raisons non exclusivement techniques ou économiques. -Quels sont, selon vous les moyens de prévention afin d'éviter à des enfants de vivre avec des maladies handicapantes ? C'est d'abord la prévention (par l'apport de l'acide folique) ce qui a permis aux pays développés de réduire considérablement (de 60 à 70%) la survenue de ces malformations. Le dépistage par un contrôle des grossesses, notamment chez les «femmes à risque» (femmes ayant un enfant malformé, notion de malformation dans l'entourage familial, niveau socio-économique défavorable). Il faudrait enfin une prise en charge chirurgicale pluridisciplinaire précoce et rapide de la malformation (les premiers jours après la naissance), ce qui n'est pas évident en l'absence actuelle de structures de neurochirurgie pédiatrique et vu la forte demande en pathologie tumorale.