Peut-on appréhender l'analyse de l'Etat et/ou de la société algérienne par l'un ou quelques-uns de leurs éléments de base, à savoir la tribu et les comportements politiques tribaux ? Dans l'affirmative, peut-on saisir la complexité et les objectifs des processus électoraux algériens à partir de ce même angle d'analyse ? Pour Mohamed Hachemaoui, politologue algérien exerçant à l'Université Paris 8 et à l'université d'Aix-en-Provence, cette approche «permet d'observer les logiques de solidarité et les stratégies de mobilisation (…), de reconstituer les réseaux de clientèles entre le centre et la périphérie, d'analyser (…) le fonctionnement politique in concreto du régime autoritaire». Les thèses du politologue s'étalent sur un peu plus de 60 pages dans les Cahiers d'études africaines. Le titre de l'étude, «Y a-t-il des tribus dans l'urne ?», flanqué du sous-titre «Sociologie d'une énigme électorale (Algérie)», ne peut manquer de susciter curiosité et intérêt. Il y a lieu de signaler aussi que près d'une dizaine de pages de cette livraison sont consacrées à une riche bibliographie susceptible d'intéresser ceux voulant approfondir la question. «Avons-nous affaire à une tenace rémanence du tribal ou au réveil d'un tribalisme dormant ?», s'interroge l'auteur dans un court résumé de son analyse. Et de poursuivre : «Si certains sujets s'épuisent une fois défrichés, d'autres exigent à l'inverse d'être régulièrement revisités. La problématique des rapports tribus versus Etats appartient à cette seconde catégorie. Une double thèse commande l'économie de ce texte.» Mohamed Hachemaoui précise encore : «La perspective interprétative, prenant le contre-pied des assomptions véhiculées par les paradigmes dominants, entend démontrer, d'abord, la prégnance du tribalisme sans tribu. L'analyse, allant au-delà des métonymies théoriques, s'emploie à montrer, ensuite, la prévalence du clientélisme politique et de la corruption électorale ; l'hybridation des trois répertoires présidant à la fabrique du politique en situation autoritaire.» Mohamed Hachemaoui, «Y a-t-il des tribus dans l'urne ?» In Cahiers d'études africaines n°205 (2012) pp 103 à 163.