L'originalité et la variété des cartes postales ornant les murs du somptueux palais du bey de Constantine, transformé pour la circonstance en immense galerie d'exposition, suscitent un surcroît d'excitation chez les visiteurs. La collection exposée, dans le cadre du Mois du patrimoine, offre aux visiteurs l'occasion de découvrir des images superbes, parfois étonnantes, auxquelles la patine du temps semble exalter le caractère précieux. Les places, carrefours, boulevards et venelles de la ville du Vieux rocher, où déambulent des passants, pas le moins du monde inquiétés par les rares véhicules à moteur, que l'on peut apercevoir sur quelques cartes postales.Des scènes prises sur le vif, que l'on aurait bien du mal à imaginer de nos jours, font pousser des soupirs de nostalgie chez les visiteurs les plus âgés de cette exposition. La place de la Brèche, (aujourd'hui place des Martyrs), entourée d'arbres verdoyants et agrémentée d'un kiosque à musique, où des petits groupes de personnes nonchalantes, respirant à pleins poumons un air pur, exempt de tout gaz d'échappement, alimente la mélancolie. L'exposition est initiée, dans le cadre du Mois du patrimoine, par le collectionneur Allaoua Seghiri, un universitaire totalement voué à cette passion, qu'il essaie de faire partager aux autres en leur dévoilant les valeurs artistique, esthétique, socioculturelle et historique de la carte postale. Pour ce cartophile invétéré, l'objet de sa passion fait partie du patrimoine. Elle ne fait pas que faire naître des nostalgies, mais permet aussi de mesurer le cheminement d'une ville, d'un lieu, d'une société et renseigne sur le mode de vie propre à telle ou telle époque. La collection de M. Seghiri fait la part belle à l'architecture de la ville de Constantine entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle. La première carte postale qu'il posséda, la «mère» de sa riche collection, date de 1883. L'exposition montre aussi des sortes de «cases» à base de briques d'argile et de terre cuite, recouvertes de toits de chaume, qui servaient de logis à une main-d'œuvre bon marché constituée d'Algériens autochtones «importés» de douars lointains pour être exploités par les colons, dans des projets de constructions urbaines. Un autre panneau de l'exposition donne à admirer d'autres lieux fameux de la ville de Constantine, tels que ses monuments (pyramide, monument aux morts), ses vieilles mosquées, ses ruelles, ses ponts, l'hôtel Palmarium et la piscine olympique de Sidi M'cid). On peut également y découvrir, plantés dans le décor en noir et blanc du début du XXe siècle, l'Hôtel de Ville, le Palais de justice, le théâtre, le Colisée, en plus d'un petit carré consacré au bijou architectural qui abrite cet événement : le Palais d'Ahmed Bey et son Musée public national des arts et des expressions culturelles et traditionnelles de Constantine.