Le président par intérim, Dioncounda Traoré, dirigera la transition jusqu'à l'organisation d'élections. Les pressions exercées par la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) sur la junte militaire malienne ont fini par payer. Les auteurs du putsch du 21 mars au Mali ont accepté, en effet, que le président par intérim Dioncounda Traoré dirige la transition jusqu'à l'organisation d'élections. Celui-ci avait prêté serment le 12 avril pour une période initiale de 40 jours, jusqu'au 22 mai. Les putschistes qui avaient renversé le président Amadou Toumani Touré (ATT) s'opposaient jusqu'à présent à la prolongation du mandat de M. Traoré. L'ex-chef de la junte militaire, le capitaine Amadou Sanogo, a officiellement remis le pouvoir en avril à un gouvernement civil de transition ; il avait continué toutefois à jouer un rôle actif dans la gestion du pays, un état de fait que ni les nouvelles autorités civiles ni la Cédéao étaient prêts à accepter. Le chef de la délégation de la Cédéao, le ministre burkinabé des Affaires étrangères, Djibril Bassolé, a ainsi fait état, samedi soir à Bamako, d'une convergence de vues entre les membres de l'ex-junte et l'organisation ouest-africaine. Cet accord a été quelque peu facilité par l'adoption, la veille, par l'Assemblée nationale malienne, d'un projet de loi accordant l'amnistie aux auteurs du coup d'Etat. «Je peux vous dire que (…) les officiers du Conseil national pour le redressement de la démocratie et le rétablissement de l'Etat (CNRDRE) sont d'accord avec les dispositions prises par les chefs d'Etat de la Cédéao, particulièrement en ce qui concerne la présidence par intérim», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à laquelle a participé le capitaine Amadou Sanogo. M. Bassolé n'a toutefois pas précisé combien de temps durerait la transition. Les deux parties ont indiqué, sans plus de détails, qu'elles poursuivraient les discussions pour définir des «mesures d'accompagnement». «Il y a accord de principe sur le nom du président de transition, mais il y a tout le reste toujours en discussion», a affirmé à la presse Mahamane Maïga, responsable d'un des partis du Mouvement populaire du 22 mars (MP22, front favorable au putsch). «Le processus n'est pas terminé, il faut en attendre l'issue pour être fixé», a-t-il ajouté. Les médiateurs de la Cédéao poursuivaient hier leurs discussions sur la question. Le ministre burkinabé des Affaires étrangères a indiqué qu'ils resteraient à Bamako «le temps nécessaire». Les menaces de la Cédéao Mais pour éviter que le capitaine et ses compagnons ne reviennent sur leur décision, la délégation de la Cédéao a été renforcée, hier, par des représentants de l'ONU et de l'Union africaine. L'idée, à travers cette initiative, est de faire passer un message clair aux militaires maliens : la junte doit rester en dehors du processus politique. Le ministre ivoirien des Affaires étrangères, Daniel Kablan Duncan, a averti, à la fin d'un sommet de ministres ouest-africains à Abidjan sur les crises au Mali et en Guinée-Bissau, que des sanctions seraient «appliquées automatiquement» à la moindre entorse au processus de retour à l'ordre constitutionnel. A rappeler à ce propos que la Cédéao avait menacé, le 14 mai, de réimposer des sanctions au Mali, estimant que l'ex-junte cherchait à «perturber la transition politique». L'organisation avait imposé des sanctions après le coup d'Etat du 21 mars, avant de les lever quelques jours plus tard lorsque la junte a accepté le retour à l'ordre constitutionnel. Si cet accord est aujourd'hui le bienvenu, il reste que le Mali est encore loi d'être sorti de l'auberge. Le plus grand défi pour les nouvelles autorités de Bamako sera d'éviter le risque de partition du pays que le putsch contre ATT a contribué à rendre aujourd'hui réel. Le renversement d'ATT a, en effet, favorisé la chute du nord du Mali aux mains d'une multitude de groupes armés, parmi lesquels de nombreux rebelles touareg mais aussi des islamistes radicaux. Le chaos malien a, en ce sens, permis à Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI) de renforcer ses bases dans la région du Sahel. A ce propos, l'on apprend que le médiateur de la Cédéao, le président burkinabé Blaise Compaoré, a ouvert des «consultations» avec ces mouvements armés en vue d'un règlement politique à la crise. Une mission des plus ardues au regard du fossé politico-idéologique qui sépare les uns et les autres.