Quelles sont les caractéristiques urbaines et sociales de la ville de Sidi Bel Abbès ? Quelles perspectives pour une cité dont l'histoire est un « enjeu » de pouvoir. C'est ce à quoi ont essayé de répondre, en esquissant des pistes de réflexion, les différents intervenants ayant pris part à la rencontre organisée par l'université Djillali Liabés, à l'auditorium du rectorat. Résultant d'un héritage culturel commun qui discipline les comportements et coordonne les activités, la ville « souffre des déficiences d'intégration de ses fonctions urbaines », explique d'emblée le Dr Lebig pour qui, il est nécessaire de définir « des valeurs communes, propres aux citoyens de la cité ». Plaidant pour une approche multiple et critique de l'histoire, encore méconnue, de la cité de la Mekerra, le Dr Oulnbia, estime cependant que l'écriture de l'histoire ne peut être faite sans le recours aux ouvrages post-indépendance et à ceux édités par des français d'origine algérienne, mais avec certaines précautions. « C'est à nous de retracer l'évolution historique de la ville. Actuellement, les données sont abondantes, reste à définir une méthodologie de travail qui intègre rigueur et vérité historique », notera-t-il. Il définira, d'ailleurs, trois repères pour une telle entreprise : élucider la polémique historiographique, restée sans réponse, de la tribu des Béni Ameur et ces 21 fractions, l'étude du phénomène mythique des pieds noirs, paru probablement à Sidi Bel Abbès et, finalement, cerner ce qu'il qualifie de « contre idéologie qui se place au début d'un choc civilisationnel », représentée par des « signes littéraires romantiques » et qu'on retrouve dans la légende du mystique Sid Biçinti (Vicente le Basque). Sidi Biçinti, un ascète qui se révèle être l'unique Marabout chrétien du monde arabo-musulman, mérite, estime le Dr Oulnbia, de faire l'objet d'une recherche plus poussée. « Ce n'est pas un luxe mais une exigence à même de rétablir certains faits dans leur contexte et par extension, d'écrire l'histoire de la ville », insistera t-il. H'mida Ayachi soutiendra l'idée d'une dynamisation de « l'espace savant » (l'université) et du travail de complémentarité qui doit être réalisé entre le pouvoir de l'argent (émergent) et celui du savoir (balbutiant) afin d'atténuer cette image de dualité que renvoie la ville à travers son processus d'évolution, défini comme tel jusque là. « Emblème du soufisme, ville garnison qu'on essaya sans succès d'appeler Napoléon ville, espace des mémoires : arabo-berbère, nègre, coloniale ; Sidi Bel Abbès est à la fois une cité moderne et ville itinéraire de tribus nomades où se côtoient l'agro-pastoral et l'industriel », signale Layachi, pour qui la culture noire et l'héritage Gnawa demeurent très peu connus à Sidi Bel Abbès. A ses yeux, l'apparition de nouveaux espaces socio-cultuels, empreints d'un soufisme qui se décline sous différentes variantes et avec beaucoup de symboliques, est révélateur d'un « profond » bouleversement dans la manière de concevoir et de vivre dans une cité comme Sidi Bel Abbès, du nom d'un célèbre Marabout, patron de la ville.