Des classes de 23 élèves, les manuels et la cantine gratuits, le bien-être de l'écolier au cœur du système… Tout cela existe, mais en… Finlande. Classé depuis des années dans le peloton de tête en matière d'éducation, ce pays nordique a réussi à faire de son système éducatif une référence dans le monde. Quel est son secret ? «L'éducation est un gage de sécurité pour une petite nation», dixit Johan Vilhelm Snellman, philosophe finlandais. Plus d'un siècle plus tard, les Finlandais n'ont pas manqué de confirmer l'adage. De nos jours, tous les systèmes scolaires envient l'école finlandaise où la réussite est devenue une tradition ancrée dans la société depuis des années. Un sentiment de sécurité chez les enfants et une motivation renforcée par la prévenance des enseignants hautement qualifiés, une utopie ? Pas en Finlande. A quoi le système scolaire finlandais doit-il son succès au point de susciter autant d'intérêt dans le monde ? «L'échec d'un élève est l'échec de l'enseignant et de toute l'école, voire de la société», répond une enseignante de langues étrangères au collège d'Anttila à Lohja, à 56 km de Helsinki, la capitale. C'est dire que l'éducation est une affaire nationale dans ce pays. Avec seulement 5,4 millions d'habitants sur une superficie de 338 000 km2, la Finlande a toujours voué un profond respect pour l'école. Peu favorisée par les ressources naturelles, la Finlande fit le choix d'offrir une formation à sa population afin d'éviter une scission entre une élite ayant fait des études et une classe populaire inculte. En 1921 fut adoptée la loi sur la scolarité obligatoire, qui oblige tous les enfants à effectuer une scolarité primaire et secondaire d'au moins six ans. Par conséquent, le gouvernement garantit à tous les enfants une égalité d'accès aux études, indépendamment de l'origine sociale et des moyens financiers des uns et des autres. Contrairement aux idées reçues, «plus jeune, mieux c'est», l'enfant finlandais commence sa scolarité à l'âge de 7 ans afin qu'«il puisse grandir et se développer sereinement», explique-t-on. L'élève est roi ! «Aucun élève ne doit sortir de la classe sans avoir assimilé les cours, quitte à l'assister de manière individuelle», explique Liisa Saarniniemi, principale adjointe au collège d'Anttila. Dans tous les établissements, des équipes constituées d'assistants, d'infirmiers, de psychologues et de travailleurs sociaux assurent le bien-être de l'écolier. «Nous accordons une grande importance au dialogue avec les élèves afin de trouver une solution pour chacun», précise la principale adjointe. L'enseignant veille, entre autres, à ce qu'un bon esprit règne au sein de la communauté des élèves, tout en faisant attention à ce que personne ne se retrouve exclu du groupe ou victime de harcèlement. Ainsi, à toutes les étapes du parcours scolaire, les relations entre enseignants et enseignés sont à la fois décrispées et chaleureuses. Et pour mieux détendre l'ambiance en classe et décharger l'élève d'une pression supplémentaire, le système de notation ne commence qu'à partir de la cinquième année du primaire. Les cours sont répartis sur 30 heures par semaine, de 8h à 15h. Avec pas plus de 23 éléments par classe, l'école peut proposer aux élèves en difficulté des cours de soutien gratuits. La gratuité concerne également les études depuis le cycle primaire jusqu'au secondaire, avec manuels scolaires, cantine et transport inclus. «Nous faisons de notre mieux pour que l'enfant ne se soucie d'aucune préoccupation, en lui épargnant les problèmes du déjeuner et du transport afin de se concentrer exclusivement sur ses cours», explique Liisa Saarniniemi. De leur côté, les parents de l'élève doivent être en contact permanent avec le personnel de l'établissement scolaire. Lorsque les parents ne se présentent pas à l'école, c'est via internet que l'administration les informe du moindre détail du niveau ainsi que du comportement de leur enfant. Esprit d'initiative Si le pays nordique met à la disposition des petits Finlandais des moyens pédagogiques, logistiques et technologiques assez modernes, c'est pour escompter des résultats exceptionnels à l'échelle mondiale. Et ça marche ! Pour preuve : les derniers rapports des études PISA de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) mesurant les acquis des élèves indiquent que les écoliers finlandais arrivent les premiers dans le monde pour ce qui est de la maîtrise de la lecture et se retrouvent, en plus, bien placés dans les autres matières, à l'exemple des mathématiques et les sciences. Dès son plus jeune âge, l'enfant finlandais apprend à se documenter, à penser à travailler par lui-même. «La motivation de l'élève repose sur l'incitation», s'accordent à dire les enseignants à Anttila. Les élèves prennent l'initiative de travailler par deux ou en groupe, en classe et à l'atelier. L'élève a le droit de circuler en classe à la recherche d'informations et de conseils, au lieu de se creuser la tête en silence. Après les cours, les élèves mettent en pratique ce qu'ils ont appris en classe à travers des travaux pratiques dans des ateliers dotés de moyens modernes et solides aux couleurs chatoyantes. A la fin de l'année scolaire, les élèves en terminale passent l'examen d'entrée dans l'université de leur choix. Ceux qui n'obtiennent pas le diplôme de fin d'études secondaires peuvent repasser trois fois les épreuves. De même, ils peuvent opter pour une formation professionnelle ou les deux, à savoir l'université et la formation professionnelle en même temps. Enseignants hors pair ! Pour mieux accompagner les écoliers, les enseignants du primaire disposent d'un haut niveau de formation. Ils doivent être titulaires d'un master en sciences de l'enseignement, avec spécialisation en méthodes pédagogiques. Ceux du collège et du lycée disposent d'un master assorti d'une spécialisation en sciences éducatives. Quant aux animateurs et animatrices de jardins d'enfants, ils sont eux aussi diplômés d'enseignement supérieur. Pourtant, les enseignants finlandais ne sont pas les mieux payés dans le monde. D'après une étude publiée en 2011 par le réseau de la Commission européenne, Eurydice, sur les salaires moyens des enseignants et des chefs d'établissement (de la maternelle au lycée) dans 31 pays de la zone euro, l'enseignant finlandais perçoit un salaire annuel allant de 29 663 euros (pré-primaire) et 40 088 euros (primaire) à 49 875euros (lycée), soit pas plus de 4200 euros/mois, et un tiers de plus pour les chefs d'établissement. A l'opposé, au Luxembourg, les enseignants reçoivent en moyenne 88 315 euros par an, soit 7360 euros mensuellement. Les salaires sont fixés et négociés au niveau local ou municipal. Sur le budget de l'Etat, 11 à 12% sont consacrés à la formation. Les établissements, placés sous la responsabilité directe de la municipalité, ont toute latitude de définir les modes de travail et répartir les moyens alloués. Mais au-delà de la récompense matérielle, la réussite des élèves est la plus haute satisfaction des enseignants ainsi que du reste du personnel de l'éducation. Ainsi, le secret du succès du système éducatif finlandais ne repose pas exclusivement sur les moyens matériels, mais sur l'intégrité des enseignants et des décideurs de ce pays qui ont compris que l'éducation est le socle de chaque pays.