La destruction par l'armée syrienne d'un chasseur turc a servi d'étincelle à une guerre froide. Pour le moment… La Turquie a prévenu hier qu'elle riposterait à toute violation de sa frontière par la Syrie, où des combats d'une violence inédite se déroulaient autour de positions de la Garde républicaine dans la périphérie de Damas. De son côté, l'OTAN, réunie d'urgence à Bruxelles à la demande d'Ankara à la suite de la destruction en vol d'un de ses avions de combat par la Syrie vendredi, a jugé cet incident «inacceptable» et exprimé son «soutien et sa solidarité» à la Turquie. Dans le même temps, l'armée syrienne affrontait des rebelles à 8 km du centre de la capitale, à Qoudsaya et Al Hama, autour de positions de la Garde républicaine, corps d'élite chargé de la sécurité de Damas et de ses banlieues, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Lors d'un discours devant le Parlement, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a violemment condamné le régime syrien et affirmé que «les règles d'engagement des forces armées turques (avaient) désormais changé». «Tout élément militaire qui posera un risque et un danger de sécurité à la frontière turque venant de la Syrie, sera considéré comme un cible» militaire, a-t-il affirmé. Voyant dans la destruction de son avion en plein vol un «acte hostile» et une «attaque lâche du régime (du président Bachar) Al Assad», il a souligné que cet événement montrait que ce régime était «devenu une menace claire et proche pour la sécurité de la Turquie comme pour son propre peuple». Il a affirmé que le F4 Phantom avait été abattu en mission d'entraînement dans l'espace international et non dans l'espace syrien, comme l'affirme Damas. La Turquie ripostera «en temps opportun» et avec «détermination» à la chute de son avion, a ajouté M. Erdogan, en précisant que son pays continuerait de soutenir le peuple syrien jusqu'à la chute de la «dictature cruelle» en place à Damas. «Mépris pour les règles internationales» Dans le même temps, l'OTAN s'est réunie à la demande de la Turquie, qui a invoqué «l'article 4 du traité» de l'Alliance prévoyant que tout pays membre peut porter une question à l'attention du Conseil quand il estime que son intégrité territoriale ou sa sécurité est menacée. «La sécurité de l'Alliance est indivisible. Nous sommes aux côtés de la Turquie dans un esprit de forte solidarité», a déclaré le secrétaire général de l'Alliance atlantique, Anders Fogh Rasmussen, à l'issue de la réunion. L'attaque contre l'avion turc est un «exemple supplémentaire du mépris des autorités syriennes pour les règles internationales, la paix et la sécurité, ainsi que pour la vie humaine», a-t-il encore estimé, sans évoquer l'option militaire. Selon des experts spécialisés russes cités par l'agence d'Etat Ria Novosti, le F4 Phantom abattu testait la défense antiaérienne syrienne pour le compte de l'OTAN et sa destruction a montré l'efficacité des systèmes russes dont est équipée la Syrie. Le vice-Premier ministre turc, Bülent Arinç, avait souligné lundi qu'un avion de sauvetage en mer turc avait en outre essuyé des tirs syriens alors qu'il menait des recherches pour retrouver les pilotes du F4 Phantom. Il a menacé d'interrompre les exportations d'électricité de la Turquie vers la Syrie en représailles, même si cela pourrait affecter la population civile déjà éprouvée par plus de 15 mois de violences. Damas avait accusé auparavant Ankara de vouloir «attiser» la crise et mis en garde contre toute «agression» contre le territoire syrien, assurant «ignorer» la nature de la cible abattue. L'Iran, allié de Damas, a indiqué hier vouloir user de ses «bonnes relations» avec la Turquie et la Syrie pour régler le dossier, qu'il a qualifié de «très délicat». Pendant ce temps, les membres du nouveau gouvernement syrien prêtaient serment devant le président Al Assad, selon la télévision syrienne. A travers le pays, les violences ne faiblissaient pas, faisant au moins 15 morts, d'après l'OSDH, dont six dans les combats entre l'armée et les rebelles près de Damas. La veille, elles avaient fait 95 morts, en majorité des civils, selon la même source.