Les poissons boivent-ils de l'eau ? Cette question s'est posée à un pêcheur au bord de la déshydratation, au bord d'une rivière morte. Car les facteurs se sont conjugués ces derniers temps, canicule, Ramadhan, pannes d'électricité qui se répercutent sur l'alimentation en eau, et pour finir un problème de distribution d'eau minérale en bouteilles. Au final, une soif terrible qui dévaste les femmes et les enfants, les hommes et les forêts. On exagère bien sûr, mais l'équation s'est compliquée par un taux d'humidité qui rivalise avec celui de l'inflation ; on perd des litres d'eau par transpiration et on n'en récupère pas, comme on perd des guerres et on ne gagne aucune bataille ou on perd des cerveaux en récupérant des incapables. C'est entre autres pour ces raisons qu'il y a quelques jours, dans le petit village d'El Frine, commune de Aïn Assel, wilaya d'El Tarf, qui, comme son nom l'indique, est éloignée de tout, un groupe a protesté. Comment ? En érigeant un mur de briques sur la RN44. Cette soif de justice dans le cadre de l'autoconstruction aura dépassé le mur du possible. Un mur de briques, érigé en pleine nuit, édifié en travers de la route, pourra être expliqué comme un insoutenable incivisme, au prix où sont les matériaux de construction. Mais il aura obligé le wali, qui se rendait à son bureau dans sa voiture blindée, à faire un détour. Le mur a bien sûr été détruit par la gendarmerie, mais on peut en tirer deux ou trois choses. D'abord, une projection, avec le mimétisme dont savent faire preuve les émeutiers, manifestants, protestataires et revendicateurs : tout le réseau routier du pays risque d'être paralysé par des milliers de murs de briques, ce qui poussera les autorités à interdire la vente de briques sans registre, tout comme l'essence est interdite aux non-automobilistes. Mais surtout, on en tire une information : le wali d'El Tarf va au bureau.