Rabia Mimoun(1) pense que la connaissance ne se développe pas en ligne droite, sa voie rappelle plutôt une série de cercles, une spirale, car la connaissance de l'homme a une foule inépuisable de nuances dans la façon d'aborder, d'approcher la réalité. « L'histoire de la philosophie nous enseigne que l'érection en absolu de la connaissance sensible aboutit à un empirisme unilatéral, à une sous-estimation de la pensée théorique », écrit-il dans son livre sur le rôle cartésien dans la philosophie moderne.(2) Poussant plus loin son analyse, Rabia Mimoun croit que les sensations, qui sont le reflet du monde objectif, ne suffisent pas en elles-mêmes pour dévoiler l'essence des choses. Pour cela, il faut encore la pensée théorique, la vérification des données de la connaissance par la pratique, par l'expérience. Dans l'un de ses nombreux essais philosophiques, il approfondit cette vision en écrivant : « Le monde objectif est la source de la connaissance. Il agit sur nos organes des sens et engendre des perceptions, des sensations, des représentations. Sur la base de leur analyse, de leur synthèse, de leur généralisation et de leur vérification par la pratique, se créent des concepts, des abstractions scientifiques, des théories... » Rabia Mimoun cite beaucoup Hegel qui pense que la connaissance ne découvre dans le monde de la réalité (en qualité d'essence et de base de cette réalité) que les différents degrés et moments du développement de « l'idée absolue », créatrice de la réalité. En disciple de Descartes, Rabia Mimoun croit que les idées, les concepts, ne sont que le reflet de la réalité objective, le reflet du monde matériel dans le cerveau de l'homme. La conscience et la pensée sont la fonction du cerveau, la propriété de la matière hautement organisée. Mais, en philosophie humaniste aussi, il ne manque pas de souligner : « Qu'en apprenant à connaître les lois du monde objectif et en s'en rendant pratiquement maîtres, en les utilisant, les hommes font ainsi concorder toute leur activité et leur pensée avec les lois du monde objectif. Autrement, ils ne pourraient pas exister. » Plus tard, il ajoutera dans un autre essai que « la connaissance de l'homme se développe sur la base de l'activité pratique dont le but est de dompter et d'utiliser les forces du monde matériel. » Rabia Mimoun s'est beaucoup intéressé à la logique. Dans ce domaine, il pense que la science de la logique, comme toute science, est une science historique. C'est la science du développement historique de la pensée humaine. Et naturellement, elle se développe en même temps que la pensée, que la connaissance. Donc, sous ce rapport, la logique, science de la pensée exacte et de ses lois, constitue une partie inséparable de la théorie de la connaissance et, dans ce sens, elle coïncide avec elle. Quant à la logique formelle, notre philosophe croit qu'elle apprend à considérer les concepts, comme achevés, détachés abstraitement du général et se détournant de l'isolé et du particulier. (1) Professeur de philosophie à l'université d'Alger. (2) Le problème du rôle cartésien (en arabe). Enal 1982, Alger.