L'article publié par notre journal jeudi dernier et relatif à la rencontre entre les familles de Abane Ramdane et de Krim Belkacem a déclenché, sans le vouloir, un début de polémique sur l'objet de ce dîner offert par l'organisateur. Mohamed Maïz, puisque c'est de lui qu'il s'agit, semble avoir « piégé » les deux familles sur l'objet d'une rencontre ouverte aux journalistes. Contacté par nos soins, le concerné a bel et bien précisé qu'il s'agissait d'une réconciliation entre les deux familles. Pour ce faire, il a même invité certains journalistes pour immortaliser cet événement, apparemment sans le consentement des deux familles comme le prouve la mise au point des Abane. Question : pourquoi alerter la presse si la rencontre devait être intime et sans enjeu majeur qui aurait pu justifier une couverture médiatique ? Précisément, c'est cette « réconciliation annoncée » qui a motivé El Watan pour se rapprocher de l'organisateur et médiatiser l'initiative qui, si elle était fondée, aurait sans doute eu un retentissement aussi fort que la stature des deux illustres chahids. Malheureusement, il y a eu tromperie sur la marchandise, et notre journal n'a absolument aucune intention de nuire à l'image de ces deux icônes de la révolution, pas plus qu'il ne souhaite souffler sur les braises. Il ne lui appartient pas non plus de dire les vérités historiques sur l'assassinat de Abane Ramdane, qui sont du seul ressort des acteurs vivants de la révolution et des historiens. Du reste, les circonstances de la mort tragique de Abane sont abondamment narrées et commentées dans les séminaires et les livres d'histoire et même dans les journaux algériens. Dans les deux mises au point publiées par El Watan dans son édition d'hier, il ressort que les deux familles récusent la notion de « pardon » et de « réconciliation », mais pour des raisons diamétralement opposées. Si la famille du défunt Krim Belkacem, dont personne ne conteste l'engagement et le sacrifice pour l'indépendance dans son pays, considère que le chahid « n'a jamais été l'auteur ni le commanditaire du forfait » et qu'à ce titre il n'y avait pas matière à solliciter, tel n'est pas l'argumentaire de la famille Abane. Celle-ci affirme que « l'architecte de la révolution ne lui appartient pas, donc si pardon il doit y avoir, c'est au peuple algérien, une fois éclairé sur les circonstances exactes de son assassinat, qui jugera s'il faut pardonner ou pas ». Il est donc clair que « l'emballage » de cette rencontre, qui aurait pu passer inaperçue, a faussé les analyses et déclenché la polémique. Y a-t-il eu donc manipulation ? « Nous ne nous laisserons jamais manipuler ni par tel courant ni par un autre, la médiatisation d'un dîner convivial à qui profite-t-elle ? » Cette interrogation de la famille Abane prouve si besoin est que quelque chose n'a pas tourné rond dans cette affaire.