Les écoles préscolaires publiques sont pleines à craquer. Les parents peinent à dénicher une place pour leurs enfants. Les écoles privées restent hors de portée. Les classes préparatoires ont ouvert leurs portes hier aux élèves âgés de 5 ans. L'enseignement préparatoire n'est toujours pas obligatoire bien que l'ancien ministre, Benbouzid, comptait le rendre obligatoire à partir de 2009, dans le cadre des réformes entreprises. Des moyens ont été engagés pour généraliser le préparatoire, mais aujourd'hui encore, les établissements scolaires sont loin d'offrir les conditions d'accueil nécessaires pour cette catégorie d'élèves. L'indisponibilité des places au niveau des écoles primaires est la tracasserie principale des parents et des responsables du secteur. Cette situation est signalée notamment dans les cités populeuses, où l'on peut trouver des classes préparatoires de plus de 30 élèves. De nombreux parents ont donc été invités à chercher des places ailleurs. L'enseignement préparatoire devrait être encouragé, selon les enseignants et autres pédagogues. Ils sont nombreux à tirer la sonnette d'alarme sur «le massacre» que sont en train de subir les élèves censés être dotés de tous les moyens pour démarrer leur scolarité dans de bonnes conditions. Les enseignants crient à «l'anarchie et à la confusion». Les établissements scolaires du primaire accueillent des sections du préscolaire sans disposer des conditions adéquates, à savoir les équipements élémentaires de base et un personnel qualifié. Le président de l'Union nationale des personnels de l'éducation et de la formation (Unpef), Sadek Ziri, met en exergue l'absence de moyens : «Cette catégorie a besoin de moyens d'apprentissage spécifiques, de jeux et autres moyens de distraction, d'une prise en charge spécifique pour l'hygiène et la nourriture. Les enfants ayant à peine cinq ans ont besoin d'une période de transition, nécessitant une écoute et un personnel recruté à cet effet.» M. Ziri conteste la démarche de la tutelle consistant à recourir au personnel enseignant du primaire pour la prise en charge des classes préparatoires : «C'est aberrant pour les deux parties. L'enseignant ne peut pas se substituer au personnel du préscolaire qui doit être doté de connaissances psychologiques et épaulé par des agents en charge de l'entretien et de l'hygiène. Il ne s'agit pas uniquement d'appliquer un programme, mais d'accompagner l'enfant qui doit se familiariser avec l'école sans être détaché complètement de son milieu familial et convivial. Ce n'est pas à un enseignant de remplir cette tâche.» De son côté, Hakim Aït Hamouda, porte-parole du Syndicat national des travailleurs de l'éducation (SNTE) qualifie de «massacre» la façon dont est appliqué cet enseignement. «Dans certaines écoles, on peut trouver des classes préparatoires en surcharge, comme c'est le cas dans les communes des Eucalyptus et Bachedjarrah où jusqu'à 35 élèves sont entassés par classe», révèle M. Aït Hamouda, en rappelant que les normes exigent un seuil maximum de 24 élèves par classe. C'est le cas dans les grandes villes où des écoles refusent carrément d'accueillir d'autres élèves. Le privé ou rien Le SNTE évoque également le retard accusé dans la réception des structures en projet pour renforcer les capacités d'accueil. En l'absence de places pédagogiques, les parents se voient donc dans l'obligation de se diriger vers les structures privées, où les enfants sont pris en charge en suivant le programme de la tutelle en plus des activités et autres apprentissages disponibles. Les tarifs n'étant pas accessibles à tous – de 7000 à 12 000 DA/mois – et vu le caractère facultatif de cette étape, nombreux sont les enfants qui n'accèdent pas au préparatoire. Dans les jardins d'enfants étatiques, le problème de la surcharge se pose aussi, en plus de la cherté des tarifs exigés : 4000 DA pour certains. Selon les enseignants, «c'est une aberration pour les enfants privés de cette étape. Ils démarrent leur première année primaire avec le sentiment d'avoir raté quelque chose. Car au moment où certains de leurs petits camarades se sont familiarisés avec l'école, eux affrontent pour la première fois toutes ces peurs. Et cela pourrait constituer un facteur de retard ou de blocage», explique M. Aït Hamouda. Un appel est lancé par les deux syndicats à l'adresse de la tutelle. «Il s'agit de définir si ce type d'enseignement est obligatoire et de donner les mêmes chances à tous les enfants d'y accéder, ou le supprimer carrément. Il faut éliminer tous les facteurs d'inégalités pouvant résulter de cette confusion. Le recours au privé doit être un choix et non dicté par l'absence des places pédagogiques», soutiennent les représentants des deux syndicats. Ahmed Tessa, pédagogue, qui reconnaît les lacunes rencontrées dans le processus de la généralisation des classes préparatoires, plaide pour «l'encouragement de cet enseignement et pour le rendre obligatoire, vu les résultats réalisés, notamment dans les établissements consacrant le bilinguisme. Il faut généraliser cet enseignement dans les écoles publiques pour lever toute forme d'inégalité ou d'injustice, pour permettre aux élèves de démarrer leur cursus primaire avec les mêmes chances».