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Les deux grandioses maqamate
Publié dans El Watan le 23 - 03 - 2006

Comme nous l'avions constaté avec la modernité et la subversivité des Mille et une Nuits, les maqamate de Hamadani et celles de Hariri sont un prolongement immédiat, spontané et complétif de ce livre phare dans la littérature arabo-musulmane.
Nous avions constaté que les Mille et une Nuits avaient pour thème central et nodal la nécessité de révolutionner l'homme et la société musulmane, déjà à la fin du IIe siècle de l'Hégire ! Le plus étonnant, c'est que treize siècles plus tard, nous en sommes encore là. Mieux, nous avons reculé d'une façon prodigieuse. Le mot générique pour codifier ces textes incroyables est : iconoclastie. Dès le début du deuxième siècle, Ibn El Moukaffaâ écrit son Kalila ou Dimna et El Djahedh écrit son Al Boukhala. De fait, ils vont installer la prose arabe qui n'existait pas jusqu'alors et remettent en cause implicitement la domination excessive de la poésie trop sacralisée à leur goût. C'est, en soi, une révolution incroyable. Puis arrive le grand Abou Al Ala Al Maârri et son fabuleux Epître du Pardon, premier texte philosophique d'obédience athéiste qui inspirera à Dante, sa Divine Comédie. Ainsi, la grande rupture avec la poésie est faite. Déjà, avec les « Mille » ! Les maqamate vont suivre et parachever cette révolution non seulement linguistique, grammaticale mais aussi politique et sociologique. Avec les maqamate, la langue populaire va investir l'art littéraire et va s'opposer au maniérisme de la poésie entretenu et défendu par les khalifes qui sont tous des despotes et des dépravés ; car le pouvoir abbasside est, à ce moment là, en pleine ascension et en pleine expansion. Ce nouveau genre populaire va alterner la prose et la poésie mais en choisissant une thématique à la fois philosophique et politique très complexe où le citoyen de l'époque était au centre des préoccupations des deux maqamate dont la complexité vient de la structure tentaculaire et de l'utilisation de toutes les langues, de tous les parlers et de tous les sabirs de toutes les ethnies qui coexistaient à l'époque, dans l'Empire musulman. Le style passait de la langue savante à l'argot le plus cru, avec une facilité déconcertante. La première maqama a été écrite par Ahmed Al Hamadani, né à Hamadane en 968 et mort à Baghdad en 1008, gratifié du titre de Badii Ezzaman. La deuxième maqama a été écrite un peu plus tard et paraît comme une imitation prodigieuse de la première. Comme si son auteur voulait rendre un hommage vibrant à son maître Badii Ezzaman. Son auteur, Al Hariri, est né en 1054 à Baghdad et décédé dans la même ville en 1122. Mais les deux textes se complètent et celui de l'élève ne manque pas de génie. La preuve en est qu'aujourd'hui, on parle des maqamate comme s'il s'agissait d'un seul et unique texte. Les maqamate sont donc des textes-romans, des textes-théâtres et des textes-théories. Elles utilisent une langue qui à l'arrivée est d'une grande subtilité et qui forme une énorme métaphore à la fois métaphysique, philosophique, politique et...subversive. Chaque maqama se projette et met en exergue un personnage marginal : le menteur, le voleur, l'ascète, le mendiant, le hors-la-loi et le voyou. Ainsi, on passe de l'extatique au libertin, sans aucune transition ! Mais le personnage le plus connu est celui d'Abou Zaïd qui pulvérise la maqama de Hariri. Abou Zaïd est un libertin doublé d'une intelligence hors du commun. Il boit, fornique et passe son temps à écouter de la grande musique dans les tavernes de Baghdad et à médire des khalifes,qui sont parfois des despotes dépravés, des ministres, des bureaucrates et des policiers. Ils s'en prend tout particulièrement aux faux dévots et aux hypocrites qui font commerce de la religion musulmane, à des buts bassement lucratifs. Mais l'arme la plus redoutable des maqamate, c'est la langue dont la beauté, la déconstruction, les néologismes et les audaces grammaticales ont pour but de casser la langue de bois des chefs politiques et des théologiens retardataires. Car la grammaire va être l'une des cibles des maqamate qui précèdent la rupture épistémologique que va créer deux siècles plus tard Abou Hayyan Attaouhidi. Al Hamadani, comme Al Hariri étaient des linguistes exceptionnels et des érudits dont le savoir était incommensurable. Mais aussi des révolutionnaires implacables et sincères. Leurs textes vont devenir le modèle populaire pour remettre en question aussi bien le discours politique que religieux. Comment les deux auteurs ont-ils échappé à la censure, à la mise à mort et à l'exclusion ? (Alors qu'ibn El Mouquaffaâ a été, lui, soumis au supplice de la roue et atrocement exécuté) Certains exégètes expliquent cette « survie » par le génie indéniable des auteurs et par leur popularité foudroyante qui les a protégés des prédateurs de tout genre. Ainsi les maqamate, comme les « Mille » peuvent être considérés comme le prélude indiscutable à l'avènement du roman qui va voir le jour au... XVIe siècle, surtout grâce à Rabelais en France et à Cervantès en Espagne. Deux pays méditerranéens qui, à l'époque, étaient imprégnés par la culture arabo-musulmane, aussi bien dans son aspect artistique que dans son aspect philosophique et scientifique. Plus proche de nous, l'immense romancier novateur irlandais, James Joyce, reconnaîtra qu'il écrivit son Fennegan's Wake en pensant aux maqamate, puisqu'il utilisa une dizaine de langues et de dialectes européens différents pour rédiger ce superbe roman.

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