Les élèves sont pris en otages dans un conflit sans fin. S' il y a un secteur qui semble être démissionnaire devant les doléances de ses travailleurs, c'est sans doute celui de l'Education nationale. Et pour cause, les enseignants du secondaire sont en grève depuis quinze jours déjà, et ce, avec un taux avoisinant les 100%, alors que rien ne semble être fait pour satisfaire les revendications des grévistes. Premières victimes, les élèves ! C'est la deuxième fois en l'espace de neuf mois, cette année, que les enseignants du secondaire débrayent en raison de la non-tenue des engagements quant à la satisfaction de leur plateforme de revendications. «Il nous est impossible d'enseigner dans des conditions qui n'honorent guère un secteur aussi noble qui est l'éducation. Des rats circulent librement dans des classes, l'absence de toilettes pour les élèves et les enseignants, pas de portes pour certaines toilettes, cela se passe pourtant en 2012», déplore Smaïl Bendhib, premier responsable du Cnapest à Blida, l'organisation syndicale qui est derrière ce mouvement. «Imaginez que les différents lycées, dans notre wilaya, manquent de 164 postes budgétaires dans des matières importantes, comme la comptabilité, les mathématiques, l'anglais, les sciences naturelles… Plusieurs élèves sont donc sans professeur et l'on se demande ce qu'ils feront le jour de l'examen comme le bac. Où est la tutelle ?», s'interroge-t-il. Et comme un malheur ne vient jamais seul, plusieurs établissements fonctionnent sans encadrement et sans moyens pédagogiques ! «C'est grave de trouver des lycées sans directeur, ni censeur, encore moins de surveillant général à la fois. Des directeurs habitent Médéa ou Alger et font des navettes quotidiennes sur Blida, sans pour autant bénéficier d'un logement de fonction qui est un droit, alors que des personnes qui n'ont rien à voir avec le secteur, mais épaulées, occupent des logements appartenant à l'Education nationale. Des établissements ne sont pas dotés en nombre suffisant pour ce qui est des chaises et des tables. Des élèves ont été contraints de retourner chez eux faute de place, quelle honte!». Les classes, notamment celles de la première année secondaire sont surchargées, avec parfois cinquante élèves par classe, et aucune solution n'a été apportée pour remédier à ce grave problème. «On nous a promis onze nouveaux lycées pour cette rentrée afin d'alléger la pression. Finalement, ces lycées ne sont pas encore disponibles. Où sont les promesses des responsables du secteur ? Une commission ministérielle est venue début octobre, en vain». Les revendications des grévistes sont aussi sociales. «Nous assistons à un retard incompréhensible dans la perception de nos dus (arriérés) et ce depuis 2008 pour certains, comme des heures supplémentaires, le rappel des échelons. Les allocations familiales sont bloquées pour des raisons que seule la tutelle semble connaître. La direction de l'éducation laisse les choses s'envenimer. Nous avons l'impression que nos supérieurs nous méprisent», proteste un groupe d'enseignants au lycée de Chebli. Un lycée sinistré à Chebli «Notre lycée est sinistré. Même si nous avons d'excellents résultats, nous sommes les parents pauvres de la wilaya ! Notre établissement fonctionne sans censeur, ni surveillant général et avec un manque flagrant en agents de bureau, en personnel de réfectoire et en adjoints d'éducation. Au niveau de l'équipement : absence de laboratoire informatique et de technologie, manque de matériel de physique et chimie. Les leçons de pratique se font théoriquement !», nous lance un professeur. «Les huit classes prévues pour cette année pour absorber la surcharge sortent à peine du sol !», ajoute son collègue. Un autre enseignant conclut : «les raisons de notre arrêt de travail sont aussi bien sociales que professionnelles ! Nous voulons montrer à la tutelle et à la société (parents d'élèves y compris !) les conditions difficiles dans lesquelles nous travaillons, dire notre mal-être.» Les enseignants de Mouzaïa interpellent le wali «Nos doléances sont tout à fait légitimes, puisqu'elles concernent notamment notre plan de carrière», souligne Slimane Hamdi, président de la section syndicale du Cnapest à Mouzaïa, et de préciser : «Les états d'avancement ne sont pas du tout appliqués et les allocations familiales tardent à être accordées à qui de droit». Et pour cause, un enseignant qui est à l'échelon 2 par exemple depuis 3 ou 4 ans ne bénéficie pas pour autant de son avancement, ni du rappel malgré une décision d'application de son passage d'un échelon à un autre. «J'ai déposé auprès de mon administration un extrait de naissance de ma fille, née au mois de mars dernier, pour pouvoir jouir de mon droit à l'allocation familiale», déclare un autre jeune enseignant qui se plaint du retard cumulé dans l'application de la prime, cela fait un peu plus de six mois. «Nous ne reprendrons les cours qu'après la satisfaction de nos légitimes revendications», insiste un syndicaliste, qui nous fera remarquer que les enseignants du secondaire exigeront un engagement écrit de la part du wali de Blida, seul garant de la mise en application des différents décrets régissant le statut particulier des professeurs de lycée, en l'absence d'une administration peu soucieuse du respect des lois, selon notre interlocuteur. «Ils sont dans leur droit de demander la régularisation de leurs conditions socioprofessionnelles, mais une grève illimitée n'est pas l'unique voie pour le règlement des problèmes. Nous craignons pour l'avenir de nos enfants», déplore un membre de l'association des parents d'élèves du lycée Mouloud Kacem Naït Belkacem, de la daïra de Mouzaïa.