Le musicien de La Bataille d'Alger tire sa révérence début décembre à Moscou. Il voulait faire de la musique classique, mais ce sont les bandes originales de films qui ont fait son succès, faisant de lui le compositeur et chef d'orchestre peut-être le plus connu de la planète. Qui n'a pas entendu un jour l'une de ses musiques de films, quand on sait qu'il en a conçu environ 500 et qu'il a diffusé en plus au moins 50 millions de disques dans le monde ? Né en 1928 à Rome, il commence par étudier l'art de la trompette, avant d'obtenir en 1954 ses diplômes de composition, d'instrumentation et de direction d'orchestre. Il écrit sa première œuvre classique en 1957 et espère se consacrer entièrement à cette voie. Mais, pour arrondir ses fins de mois difficiles, il décide de travailler pour la radio et la télévision ainsi que pour la chanson populaire. Il se fait connaître petit à petit et, à partir des années soixante, il est sollicité par les réalisateurs de cinéma. C'est le début d'une carrière prestigieuse qui lui permettra de concevoir les bandes originales de films prestigieux et, notamment, les westerns de son camarade d'école, Sergio Léone : Pour une poignée de dollars (1964), Et pour quelques dollars de plus (1965), Le bon, la brute et le truand (1966, la même année que La Bataille d'Alger), etc. Sa musique a marqué l'histoire du cinéma et les spectateurs comme les critiques savent ce que les films qu'il a musicalisés lui doivent. Les réalisateurs aussi qui, même les plus grands et les plus autoritaires, ont accepté qu'il introduise son écriture musicale dans leur travail cinématographique, parfois à des niveaux de collaboration très élevés, dépassant la contribution ordinaire d'un musicien de film. Son professionnalisme et son goût de la perfection l'ont poussé à s'imprégner totalement des projets des réalisateurs pour leur proposer des musiques épousant parfaitement le sens, le ton et le rythme de leurs films. Il a travaillé avec les plus grands réalisateurs. Les Italiens d'abord, comme Bernardo Bertolucci, Pier Paolo Pasolini, Dino Risi, Vittorio de Sica, Luigi Comencini, Gillo Pontecorvo, Damiano Damiani, Ettore Scola, les frères Taviani, etc. Et les non Italiens comme Luis Buñuel, John Huston, Terence Malick, Henri Verneuil, Terence Young, Yves Boisset, John Carpenter, Michael Haneke, Roman Polanski, Brian de Palma, Pedro Almodovar, Olivier Stone, etc. On se l'arrachait littéralement. On lui doit la chanson-culte Here's to you chantée par Joan Baez pour le film Sacco et Vanzetti (1971) de Guiliano Montaldo et quantité d'œuvres remarquables qui incarnent aujourd'hui des époques de l'histoire récente du monde. Inlassable et inclassable, il a reçu de très nombreux prix et distinctions et, en 2007, un Oscar d'honneur pour l'ensemble de sa carrière lui a été décerné. Parallèlement, il a écrit des dizaines de musique de concert, poursuivant sa création vers le terrain classique de ses premières amours ou dans le domaine de la musique expérimentale. Le concert du 6 décembre prochain à Moscou, annoncé par une dépêche de l'APS, mériterait d'être retransmis en Mondovision en direct du Palais du Kremlin où il doit avoir lieu. Mais est-ce bien le dernier puisque d'autres sources annoncent un concert d'Ennio Morricone le 22 décembre à Anvers ?