Pourquoi se voiler la face ? la demande est très forte, et, en face, comme offre, il y a juste un dépôt de boissons alcoolisées sis à l'entrée nord de la ville. Les éléments de la police judiciaire ont fait une descente jeudi au cœur du quartier Bouakkel dans l'objectif d'arrêter des jeunes qui s'adonnent au commerce illicite de boisson alcoolisée. Les revendeurs faisant preuve de vigilance et usant de stratagèmes de guet à chaque coin de rue ont vite fait de prendre la poudre d'escampette. La prise était plutôt maigre et le policier en civil qui semblait diriger l'opération, laissait transparaître un air de déception : «On nous a retardés et ils ont pris le temps de s'enfuir», nous a-t-il expliqué. Le «on» désigne bien sûr la circulation automobile dans des ruelles très étroites. Le butin était maigre puisque la moitié de la marchandise était déjà écoulée. Le lieu est très connu. Tous les amateurs de boisson alcoolisée retardataires viennent s'approvisionner chez ces jeunes qui, profitant de l'absence totale de débits de boissons alcoolisées dans toute la ville de Batna et de ses environs à 50 km à la ronde, se sont découvert une vocation. Le dernier bar «Le Tassili», s'est transformé en magasin de prêt-à-porter il y a plus d'une année ; désormais un seul dépôt à l'entrée nord de la ville tient le monopole de cette boisson qui, aussi illicite soit-elle, est plutôt très prisée par les Batnéens. Jeunes et vieux s'y approvisionnent quotidiennement et se retrouvent le soir, qui dans la zone industrielle, qui dans les bois à la périphérie de la ville lorsque ce n'est carrément pas dans les coins des quartiers pour de longues soirées, qu'il gèle ou qu'il pleuve ! Une virée à la forêt de Bouyilef, à une dizaine de kilomètres au nord de la ville renseigne bien sur la situation. Les « bars en plein air » polluent l'environnement Dans cette forêt, des panneaux interdisant laconiquement la consommation de boissons alcoolisées semblent être le seul moyen de dissuasion ; mais ils n'ont aucun effet sur les adeptes de Bacchus ; preuve en est que pas un seul mètre carré de cette belle et vaste futaie n'est épargné par les canettes et les bouteilles de bière et de vin. Un autre lieu de beuverie à ciel ouvert, et qui bat tous les records, est sans conteste la zone industrielle. «Dans une opération de nettoyage de la zone, nous avons ramassé l'équivalent de 15 camions d'une capacité de 7 m3 chacun de bouteilles et de canettes. L'opération est toujours en cours», nous a déclaré Cherif Belmihoub, directeur de la société de gestion de la zone industrielle (SGI). Par ailleurs, des interrogations, pour le moins énigmatiques, autour de l'existence d'éventuels débits de boissons à l'intérieur de la zone, ont été adressées aux responsables de cette même entreprise, a-t-on appris auprès de la SGI. Quant aux revendeurs de «l'illicite» breuvage, ils sont encore plus nombreux que les deux petits jeunes qui ont fait l'objet d'une descente de police. Il y a même des revendeurs de luxe qui travaillent avec téléphone et camions frigorifiques pour livraison à domicile, nous ont indiqué plusieurs invétérés du domaine. Au passage nous trouvons opportun de rappeler le titre d'un article paru il y a quelques années dans les colonnes d'El Watan «Un bar légal fermé, ce sont 100 bars clandestins d'ouverts».