Il manquait un magazine de ce type dans le paysage éditorial algérien. Ce sont les parents et pédagogues, mais d'abord les petits lecteurs, qui sont enchantés de découvrir le numéro un du magazine Jilli, sur les étals des kiosques. Destinée aux enfants de plus de huit ans, la définition de son lectorat lui permet de répondre à une demande précise et à combler un immense trou dans l'offre nationale de magazines qui ignorait jusque-là cette catégorie pourtant bien lourde dans la démographie de notre société. Cette première sortie de la publication, soutenue par l'Office national des droits d'auteur, réalise de belle manière ses objectifs définis à travers le triptyque «éduquer, informer, divertir, avec un ancrage dans l'algérianité et la modernité». Le choix du titre a été testé auprès de groupes d'enfants qui l'ont plébiscité parmi d'autres, retenant, en plus de son côté agréable, l'affirmation de leur génération. Jilli est ainsi bien parti pour devenir l'organe central des «tchitchouanes» (les mioches) avec une diversité éditoriale qui fait la belle part au ludique intelligent et à l'éducatif agréable. C'est la combinaison équilibrée de ces deux registres qui donne à ce support toute sa qualité, renforcée par une maquette aérée, colorée et donc adaptée au lectorat visé. Une autre caractéristique de la revue Jilli réside dans son bilinguisme assumé et réfléchi, avec une prédominance de la langue arabe qui s'étend sur trois quart des surfaces. Ce positionnement correspond également bien aux tranches d'âges considérées et à leur pratique scolaire de la lecture puisqu'elles se situent entre la troisième année primaire et la deuxième année de collège. Mais c'est un moment décisif, non seulement dans le parcours scolaire, mais également et surtout dans la croissance et l'affirmation de la personnalité de l'enfant. Réparties sur 36 pages, après une petite bande dessinée de mise en bouche, Hamim et Mimha, la revue engage d'emblée les petits lecteurs à s'exprimer. Ainsi, avec photos à l'appui, un petit garçon et une petite fille se prononcent sur l'école, exprimant franchement ce qui leur plaît ou non. Cette interview croisée ouvre le dossier du numéro consacré à l'école et se poursuit par une double page très bien conçue sur les avantages de l'école. Rien de triste ou de moralisant en l'occurrence. Jilli réussit à poser un ton et un esprit qui forgent son identité éditoriale. On ne peut préjuger de l'accueil des enfants, mais il est fort probable que cette façon différente d'être sérieux saura les convaincre. En revanche, plusieurs rubriques peuvent être appréciées par les adultes qui peuvent même y apprendre des choses. Ainsi, la rubrique «Le sais-tu ?», qui fourmille de brèves illustrées sur la nature, l'histoire ou la science, se laisse lire avec intérêt, quel que soit l'âge. La rédaction de Jilli semble avoir ménagé ces espaces intermédiaires pour susciter un échange entre les petits lecteurs et leurs parents ou pédagogues. Le reste du magazine est aussi attrayant, truffé d'humour, de découvertes, de jeux de réflexion ou d'observation, et même une gentille enquête policière à démêler. La bande dessinée prend une place judicieuse entre les rubriques. De même, la mise en valeur de la culture et de l'art algériens se traduisent par d'excellentes pages, notamment celles sur l'artiste-peintre Baya, un petit bijou de pédagogie sympathique. Bon point également pour l'interview du footballeur Madjid Bougherra, que l'on découvre dans ses souvenirs d'enfance et d'autres aspects méconnus. Impossible ici de décrire la richesse et la diversité de ce support dont on notera surtout l'aspect interactif. Partout, l'enfant est sollicité dans son intelligence ou son émotion. Un concours doté de prix vient compléter cette petite merveille qui, pour une première, s'avère un coup de maître. Il faudra tenir une telle qualité. «Majalat Jilli» est un bimestriel (tous les 2 mois) édité par Sol'ed. Prix : 120 DA.