Le voyage du président François Hollande en Algérie semble avoir pour objectif de donner un nouveau souffle à la coopération entre les deux pays afin de lever toutes les hypothèques qui pèsent sur celle-ci. Sans doute, plusieurs dossiers feront l'objet de négociations. L'importance accordée aux questions économiques doit aller au-delà de simples contrats industriels et commerciaux. Elles doivent intégrer les données relatives au développement des nouveaux secteurs porteurs de l'économie d'aujourd'hui (biotechnologies, technologies de l'information et de la communication, énergies renouvelables...), en mettant en œuvre de véritables programmes communs de formation, de recherche et de transferts de technologie. Si, par ailleurs, l'histoire écrite par des Algériens et véhiculée par les médias rejette systématiquement tout ce qui a pu être produit par l'histoire coloniale, et qu'elle n'en retient que les seuls éléments qui permettent d'alimenter une «légende noire», c'est qu'une certaine France se donne toutes les raisons d'une bonne conscience au moindre coût, comme nous le montrent la réactivation des mythes de «l'Algérie française» et la réhabilitation des criminels de guerre. Si nous apprécions les condamnations des massacres du 8 mai 1945 et du 17 octobre 1961, nous estimons que la rupture avec la tradition historique coloniale qu'opère, avec courage, une nouvelle génération d'historiens ne saurait porter tous ses fruits tant que l'enseignement de l'histoire coloniale n'est pas envisagé comme un problème national et que la responsabilité historique de l'Etat français dans le drame algérien n'est pas reconnue. Et, à partir de là, nous l'espérons, l'instruction civique pourra faire son œuvre. La situation des libertés dans notre pays est à bien des égards préoccupante. Nous ne demandons pas aux Français et à leurs gouvernants de se substituer à notre peuple pour instaurer la démocratie. Nous leur demandons de ne pas contrecarrer les espoirs de liberté, de justice et d'amitié entre nos deux peuples, en se portant au secours de l'affairisme, des forces d'oppression et d'exploitation. La liberté et la convergence entre Algériens et Français dans la lutte contre le racisme, la xénophobie et les ressentiments sont à ce prix. Il faut bien admettre que les relations entre l'Algérie et la France ne se résument pas à des relations entre Etats. On ne peut évacuer la densité des rapports humains, qui impliquent des individus, des familles, des réseaux d'amitié, de syndicats, d'ONG... Les accords sur la circulation des personnes et des groupes se doivent de tenir compte de cette réalité. Paris, 10 décembre 2012. A l'initiative du Cercle Nedjma : Madjid Benchikh, Ahmed Dahmani, Mohammed Harbi, Aïssa Kadri.