Fixée à 2850 DA brut il y a deux décennies, la valeur du jeton de présence versé aux administrateurs vient d'être réajustée à la hausse par certaines sociétés de gestion de participations (SGP), sans doute en réaction au refus de l'ex-Premier ministre de relever les salaires des cadres dirigeants du secteur public économique. Cet ajustement permettra à ces cadres qui détiennent généralement un ou plusieurs mandats d'administrateur d'entreprises étatiques d'améliorer quelque peu leurs revenus salariaux. La décision prise par une dizaine de directoires de SGP est tout à fait conforme à la législation en vigueur, notamment le code de commerce qui fixe les prérogatives des propriétaires d'entreprises, parmi lesquelles celles de décider des montants des salaires et avantages à accorder aux cadres dirigeants des entreprises publiques ayant le statut de société par actions, ainsi que de la valeur et le nombre limite de jetons de présence auxquels les administrateurs d'EPE peuvent prétendre. Même si l'on ne leur reconnaît que le statut d'agent fiduciaire de l'Etat, les SGP disposent de par la loi de toutes les prérogatives de propriétaire des capitaux détenus par les entreprises qu'elles contrôlent. Des prérogatives dont ni elles ni même les institutions qui les avaient précédées (Fonds de participation, holdings publics) n'useront au temps où l'autonomie de gestion était pourtant plus effective. Et c'est curieusement à l'aune du retour au dirigisme consacré ces toutes dernières années que quelques courageux directoires de SGP ont pris l'initiative de faire valoir certaines de leurs prérogatives aujourd'hui encore garanties par la loi. Leur réaction est d'autant plus légitime que ce retour au dirigisme et aux injonctions administratives ne s'est pas accompagné, comme cela aurait été logique, par la suppression des responsabilités civile et pénale auxquelles restent toujours soumis les dirigeants des SGP et les responsables des entreprises publiques économiques. Leur mise sous tutelles ministérielles leur a pourtant fait perdre une bonne partie des pouvoirs de décision aujourd'hui accaparés par les fonctionnaires des administrations centrales auxquels l'ex-Premier ministre avait de surcroît accordé de substantielles hausses de salaires. Ces dirigeants du secteur public économique qui ne disposent pas de réels pouvoirs de décision continuent pourtant à assumer tous les risques liés à la gestion courante des entreprises qu'ils sont censés diriger comme des managers jouissant de la plénitude des pouvoirs de direction. Instaurer une harmonie dans la rémunération Au regard de la loi, les PDG et les administrateurs d'EPE demeurent, en effet, toujours responsables des actes de gestion, quand bien même les décisions à l'origine des faits incriminés seraient dictées par des instances externes à l'entreprise. Les augmentations des salaires sollicitées par les dirigeants et les administrateurs du secteur public économique mériteraient donc d'être satisfaites, ne serait-ce que pour cette raison. Aucun responsable politique sensé n'oserait reprocher aux SGP d'avoir franchi en toute légalité ce pas, en réévaluant les jetons de présence des administrateurs dont les autorités politiques ont laissé figer le montant à son niveau misérable de 2850 DA fixé en 1990. Il reste toutefois à régler la question des disparités des montants des jetons de présence qui varient excessivement selon que l'entreprise appartienne à une SGP ou une autre. Les administrateurs des entreprises de la SGP Gestour perçoivent, à titre d'exemple, 18 000 DA par jeton de présence, alors que ceux mandatés par les SGP Cabelec et Sintra ne gagnent que 15 000 DA. Les rémunérations autorisées par les SGP Centre et Gestramar sont, quant à elles, cotées à 10 000 DA, alors que celle en vigueur dans les entreprises de la SGP Injab figure au plus bas de l'échelle avec à peine 5000 DA par présence aux séances de conseil d'administration. On imagine ce que seraient ces disparités si chacun des 50 groupes et SGP gérant actuellement le secteur public économique fixait selon son bon vouloir la valeur des jetons de présence. L'Etat régulateur doit absolument intervenir, non pas pour pénaliser les administrateurs, mais pour instaurer une certaine harmonie dans le mode de rémunération de cette fonction fondamentale d'administrateur d'entreprise, considérée comme un véritable métier sous d'autres cieux.