Baba Merzoug, le plus grand canon de l'artillerie algéroise datant du XVIe siècle et transféré en France en 1830 par l'occupant, devrait être rapatrié à Alger en 2012, à l'occasion du cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie», avait confié, en octobre 2011, le président de la fondation Casbah, Belkacem Babaci, au Forum d'El Moudjahid. Mais la pièce emblématique, intégrée dans le patrimoine historique de la défense française, continue à faire couler beaucoup d'encre. Couronné du coq gaulois, le canon légendaire trône depuis 1833 à Brest, dans l'enceinte du complexe naval de l'Arsenal. Les deux Etats s'étaient dit sensibles à ce sujet, mais rien d'officiel sur cette restitution. L'imbroglio historico-politico-juridique a fini par entourer la Consulaire ou Baba Merzoug, selon l'une ou l'autre rive. La société civile algérienne, par le truchement d'un comité de pétitionnaires, avait formulé des demandes de restitution de cette pièce. On est en 2013 et point de retour de ce canon, considéré par certains comme un joyau de l'industrie militaire, fabriqué à Dar En'has. Idem pour les clés d'Alger remises par le Dey Hussein à l'armée française, après la capitulation de la ville en 1830. «Les clés d'Alger, que François Hollande voulait donner à Abdelaziz Bouteflika lors de son voyage en Algérie les 19 et 20 décembre 2012, sur fond de relance d'amitié, sont aujourd'hui la propriété du Musée de l'Armée à Paris, un bien «inaliénable» et «imprescriptible», selon l'Elysée, sauf en cas de déclassement. C'est une «ghanima» ou butin de guerre, toujours selon la France, contrairement au ministère de la Culture algérien qui considère que la pièce a «fait l'objet d'une exportation illicite». Autrement dit, «un transfert de propriété forcé résultant de l'occupation d'un pays par une puissance étrangère», explique Mourad Betrouni, responsable de la direction de la protection légale des biens culturels. «Il serait judicieux de parler de retour et non de restitution», dit-il, mettant l'accent sur le non-enregistrement de la pièce dans l'inventaire général des biens culturels, ni dans l'inventaire général des biens mobiliers domaniaux de l'Algérie. Les deux thèses (algérienne et française) se télescopent. Reste à savoir si la question du retour de ce patrimoine ne revêt pas une charge symbolique de capitulation en porte-à-faux avec le 50e anniversaire du recouvrement de l'Indépendance. Dans ce sillage, faut-il rappeler que le Musée national d'histoire naturelle de Paris, tout près de la Grande mosquée de Paris, renferme au sein de ses collections dites «ethniques» des restes de figures de proue de la résistance algérienne de la fin du XIXe siècle, dont les crânes de Chérif Boubaghla, Cheikh Bouziane et autres Moussa Al Darkaoui, que ni le ministère des Moudjahidine ni l'ONM n'ont daigné utile de revendiquer leur restitution.