Après onze ans d'absence et de « solitude », le printemps théâtral est revenu enfin sur les planches de l'opéra de Constantine. L'événement tant attendu a été fêté comme il se doit. Le soutien du ministère de la Culture, représenté lors de l'inauguration par la poétesse Rabia Djalti, mais aussi celui de la wilaya, du comité des fêtes de l'APC de Constantine et l'apport du théâtre régional de la ville étaient nécessaires pour ressusciter une manifestation qui a failli sombrer dans l'oubli. « De telles rencontres demeurent vitales pour le 4e art en Algérie, pour lequel les hommes et les femmes mènent un éternel combat contre l'hérésie et l'amnésie », nous dira un participant. Chose bien vérifiée dans les espaces de l'édifice prestigieux de la place du 1er novembre. Des moments pour des retrouvailles émouvantes. Cette deuxième édition a été marquée par une inauguration saisissante. La rétrospective de la première rencontre de mars 1995, filmée par Ali Aïssaoui, un mordu du père des arts, n'a laissé personne indifférent. L'assistance a eu droit à un retour vers ces années de braises et de douleur. Les apparitions de Abdelkader Alloula, Azzedine Medjoubi, lâchement assassinés sur les marches du théâtre, mais aussi de Sirat Boumediène, emporté par la maladie dans l'anonymat, étaient un message contre l'oubli. Le film rappellera aussi ceux qui ont été rattrapés par l'indifférence. Ceux-là mêmes qui étaient, à une époque où il était difficile de faire du théâtre, parmi les pionniers, à l'image du cheikh El Hacène Lefgoun ou Mohamed Salah Touache souffrant d'une longue maladie. De la qualité des œuvres, présentées durant 8 jours, on retiendra différents niveaux, même si le public constantinois semble avoir retrouvé une joie, presque perdue, de rompre avec la routine de la vie quotidienne pour aller faire une ambiance bien savourée dans l'enceinte d'un théâtre, qui n'aura pas vécu, depuis longtemps, une pareille affluence soutenue durant huit spectacles. De ce côté, certaines troupes ont marqué leur présence par un travail méritant bien les encouragements, alors que d'autres auront appris tant de choses face à un public difficile à tromper. En l'absence de la troupe du TNA pour des raisons qu'il convient plutôt de classer parmi les incidents diplomatiques, la palme aura été tenue par la troupe locale du TRC avec la fameuse pièce Diwan Laâdjeb, mise en scène par Hellal Antar d'après un texte de Boudjadi Allaoua, ainsi que l'inégalable troupe du théâtre d'Oran qui a fait un véritable tabac avec la pièce Nessin oua salatine, mise en scène par Ghaouti Azri, d'après les nouvelles de l'écrivain turc Aziz Nessin, (lesquelles ont été adaptées par le regretté Abdelkader Alloula), et brillamment présentée devant une salle archicomble. Les journées du printemps théâtral, dont la clôture a eu lieu hier au TRC, auront quand même tenu leurs promesses en dépit de quelques imperfections d'ordre technique, qui cependant n'auront pas gâché la fête. Une fête marquée aussi par une note d'optimisme surtout que de nombreuses troupes de jeunes à l'instar de celle de Masrah El Belliri de Constantine et celle du Théâtre de Riadh El Feth d'Alger menée par Sonia font un travail qui augure d'un avenir prometteur.