L'ancien ministre, le moudjahid Lamine Bechichi, a été l'invité, mardi dernier, du Conseil supérieur de la langue arabe, à l'hôtel El Aurassi, dans le cadre de sa tribune périodique «Personnalité et parcours». Nombre de moudjahidine et de personnalités nationales qui ont connu M.Bechichi à différentes périodes de sa vie étaient présents à cette rencontre conviviale. Il s'agissait de mettre en relief les différents aspects de la vie et l'oeuvre de cette importante personnalité du pays à qui revient le mérite d'avoir participé à la création de la publication La résistance algérienne, à Tunis, en 1956, notamment. En maître de cérémonie, la poétesse Rabia Djalti donnait ainsi la parole aux intervenants, non sans faire l'éloge de ce grand «enfant», qui a su rester digne et fidèle à ses principes, «à l'image d'un interprète à son oud.» Mme Rabia Djalti ne tarira pas d'éloges sur cet homme, compositeur de son état, dont elle dira qu'il a mené sa vie comme «une symphonie» devant un Lamine Benchichi ému. Première personne à intervenir, est le docteur Ould Khelifa. Se félicitant de l'amélioration de l'état de santé de M.Bechichi, le président du Conseil supérieur de la langue arabe soulignera l'aspect militant toujours au service de son pays de Lamine Bechichi. «Il est de ceux qui ont sacrifié ce qu'il ont de plus cher par amour du pays en vue de voir le projet d'une Algérie libre debout, une réalité». Louant ses dons artistiques pour la composition musicale, il retracera ainsi le parcours de cet homme aux multiples facettes que ce soit en tant que moudjahid, éducateur ou artiste, donnant à chaque fois le meilleur de lui-même pour les générations futures. «Il lui a été aisé de donner à plusieurs reprises son avis en tant que responsable dans les affaires du pays, sans entrer dans les enjeux idéologiques et tomber dans les magouilles hypocrites car il croyait fermement dans un Etat de droit». Pour sa part, l'ancien chef du FLN, Abdelhamid Mehri, évoquera le passé commun partagé avec Lamine Bechichi que ce soit à l'université Zitouna à Tunis ou sur les tréteaux du théâtre, donnant comme exemple la pièce de théâtre Tariq Ibn Ziad où Lamine, jeune «comédien», campa le rôle de Rodriguez. «Mais la plus grande pièce de théâtre que nous avons dû représenter est celle de la vie», fera remarquer M.Mehri. Interpellée, Rabia Djalti exhortera nos personnalités politiques à écrire leur mémoire, car «très touchée» dira-t-elle par ces anecdotes comme si elle regardait un film. Pour sa part, Amar Talbi de l'Association des ulémas musulmans algériens, rappellera le grand nationalisme de la famille des Bechichi. Il relèvera la générosité de Lamine Bechichi qui accueillait les gens chez lui, que ce soit au Caire et au Soudan, chose rare pour un diplomate. «Il nous a fait entrer dans sa maison, preuve s'il en est, qu'il respecte les gens. Ce sémillant personnage était quelqu'un de sincère et d'éloquent qui oeuvrait par amour de la nation.» Pour sa part enfin, M.Abdellah Atamnia évoquera le travail actif de Bechichi dans l'action culturelle dans les années 1970 et 1980. «On lui doit beaucoup dans le domaine culturel. Il a fait un travail formidable dans la collecte, l'enregistrement et la correction des chants patriotiques que les enfants ne cesseront, plus tard, de fredonner dans l'émission Hadikatu Es Sahira», nous apprend-on. Pour info, né le 19 décembre 1927 à Sedrata, Lamine Bechichi a été le disciple de son père, Cheikh Belkacem Loudjani, un des fondateurs de l'Association des ulémas musulmans algériens. Il a fait ses études primaires dans sa ville natale puis s'est rendu à Tébessa où il a été l'élève de Cheikh Larbi Tebessi et Saïd Zemouchi. Il a, par la suite, poursuivi ses études en Tunisie. En 1951, Lamine Bechichi entame son parcours en tant qu'enseignant, prend la direction de l'école El Hayet à Sedrata puis adhère à la lutte armée dès le déclenchement de la guerre de Libération. Après l'Indépendance, il reprend son poste d'enseignant et poursuit, en parallèle, des études à la faculté de littérature puis à la faculté de droit d'Alger. En 1969, il est nommé directeur adjoint au ministère de l'Information chargé de la musique, du théâtre et des arts populaires, puis occupe le poste de directeur de la production artistique et littéraire à l'Entreprise algérienne de la radio et de la télévision RTA (1970-1975). Après avoir occupé le poste de conseiller au ministère de l'Education nationale, il assure, quatre années durant, la direction de l'Institut national de musique puis est nommé secrétaire général du ministère de la Culture. Lamine Bechichi a également occupé le poste de ministre de l'Information. Il a, par ailleurs, reçu le prix 2007 de l'Académie arabe de musique. Il a été président de la commission artistique au Panaf de 1969. Il est, en outre, le compositeur de la fameuse chanson Ifriquia (texte de M.Mostefa Toumi) interprétée par l'artiste Mohamed Lamari à l'époque. Chanson aussi présentée par Miriam Makeba, le 5 juillet 1972, à l'occasion de la célébration du 10e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, et non lors de la première édition du Festival culturel panafricain en 1969 comme beaucoup le croient.