Projeter notre ville dans la modernité impose une requalification de son tissu urbain et la réappropriation citoyenne de ses espaces appelés à épouser des références locales, tout à fait nouvelles, capables de libérer l'individu de toute identification arbitraire. » Ainsi commence la pétition, que ses initiateurs intitulent « Plaidoyer pour le changement », qui circule dans la ville de Constantine. Différentes gens sont en train de la signer, cela va du simple ouvrier au cadre supérieur. De quoi en est-il question exactement ? La ville de Constantine, qui, comme on le sait, est confinée ou accrochée sur ou dans un relief des plus pittoresques, mais aussi des plus contraignants, a besoin d'être désengorgée de ses bouchons et d'être délogée de ses anfractuosités ou de faire place nette dans ces dernières. Le tramway, en matière de transport, en constitue un adéquat moyen et semble même être une panacée dans ce domaine à Constantine. Mais la mise en place de son tracé bute contre des résistances. De fait, le tracé doit, selon l'étude effectuée par des experts, passer par la démolition de la prison. Celle-ci est certes chargée d'histoires, surtout celle du nationalisme et celle de la guerre de Libération. Pour les modernistes, démolir la prison ne veut pas dire effacer l'histoire, cela peut se faire non sans immortaliser celle-ci par une stèle ou un monument. Car il s'agit de donner un bon coup de starter pour « la requalification de son tissu urbain », pour la bonne gestion de la ville, une ville où il fera bon vivre, du moins pour les générations à venir. Vrai, aussi bizarre que cela puisse paraître, plusieurs villes algériennes, qui étaient des villes garnisons, en ont depuis longtemps fini avec situation, mais Constantine, la troisième ville du pays, cette capitale de l'Est, qui à cause peut-être de moult atermoiements en a perdu le statut, traîne encore. Aussi est-il légitime et opportun que les pétitionnaires concluent ainsi : « Il est temps de lever le siège et libérer les territoires occupés de cette antique cité, de sortir la prison de son centre, de lui restituer ses plateaux, ses espaces de convivialité et de fermer les casernes pour mieux effacer les stigmates de la ville garnison. »