Le problème de l'immigration clandestine, contre lequel les Etats du nord de la Méditerranée ont décidé de mener une véritable guerre pour endiguer le flux migratoire en provenance principalement des pays subsahariens, n'est pas nouveau en Algérie. De par sa position géographique de zone tampon entre le Nord et le Sud ayant des frontières communes avec plusieurs pays africains qui sont autant de corridors d'accès pour les immigrants clandestins en provenance de pays africains les plus au sud du continent, l'Algérie a depuis longtemps constitué une zone de transit pour les candidats à l'immigration clandestine. Pendant de longues années, les pouvoirs successifs, pour des raisons politiques que l'on connaît, se sont accommodés de ces immigrants clandestins que l'on n'hésitait pas à faire recruter dans les chantiers du bâtiment, notamment à Tamanrasset et ailleurs y compris ceux relevant du secteur public. Ces clandestins, on les retrouvait aussi comme jardiniers, maîtres de maison et autres petits métiers de subsistance. C'était l'époque où la voix africaine de l'Algérie résonnait sur toute l'étendue du continent et où la politique de bon voisinage était érigée en dogme politique allant jusqu'à sacrifier les intérêts nationaux en fermant les yeux précisément sur les immigrés clandestins qui se rendaient en Algérie en quête de travail avant de regagner par la suite leur destination finale : l'Europe. Il n'y a pas longtemps, il était tout simplement incongru, voire politiquement incorrect du fait des relations stratégiques qui nous lient à nos voisins d'évoquer les fléaux sociaux que l'on impute aujourd'hui de la manière la plus officielle aux immigrants africains, tels que le trafic de drogue, la prostitution et le commerce des faux documents d'état civil. L'Algérie paie aujourd'hui la rançon d'une politique. Naufragés du désert Les proportions alarmantes prises par le phénomène de l'immigration clandestine depuis ces dernières années a amené les pouvoirs publics en concertation avec les gouvernements des pays frontaliers à mettre en place des mécanismes de rapatriement des clandestins confortés en amont par des dispositifs de prévention et de lutte contre ce phénomène. L'Algérie a plus d'une fois organisé sur ses propres fonds des opérations de retour des clandestins dans leur pays d'origine, notamment ceux provenant des pays frontaliers, en leur garantissant même un droit au retour sous forme de financement de projets de développement dans leurs villages d'origine. La source de l'émigration clandestine ne s'est pas pour autant tarie. Bien au contraire, de nouveaux flux migratoires de plus en plus importants sont venus se déverser dans notre pays en provenance de lointains pays africains situés à des milliers de kilomètres de nos frontières. L'apparition du terrorisme dans la région pansahélienne confirmée par les événements qu'a connus le Sud algérien, dont le dernier en date l'assassinat d'un groupe de douaniers algériens par une groupe terroriste décimé par les forces de l'ANP, a conforté les autorités algériennes et les gouvernements des pays africains voisins dans leur conviction que la riposte au phénomène est collégiale. De par leur vulnérabilité, ces naufragés du désert constituent une proie de prédilection pour les groupes terroristes qui pourraient être poussés par la tentation de recruter dans leurs rangs surtout les ressortissants africains de confession musulmane. Les chiffres des clandestins appréhendés et expulsés par les services de police algériens se sont élevés au cours de ces trois dernières années à 15 000 étrangers de différentes nationalités. Il est heureux de constater aujourd'hui que les pays voisins ont pris conscience que le phénomène de l'immigration est porteur de graves dangers pour la stabilité non seulement de l'Algérie, mais de toute la région. La tenue depuis mercredi de la deuxième session ministérielle du comité bilatéral frontalier algéro-nigérien à Tamanrasset participe de la volonté partagée de l'Algérie et du Niger de prendre à bras-le-corps le phénomène de l'immigration clandestine. L'écoute que trouve désormais l'Algérie auprès de ses voisins permettra à notre pays de ne plus subir seul, impuissant, ce phénomène, mais d'y faire face dans un cadre concerté et avec une stratégie plus productive qui consiste à s'attaquer non plus aux effets du problème, mais à ses causes dans le cadre plus large de la coopération bilatérale.