Pour Hacène Chorfi, artiste plasticien, «l'art contemporain est un message esthétique, non conventionnel ; il est libre, il n'est pas lié au beau selon des canons précis; l'essentiel est l'idée, ou le concept ; l'on est dans le comment va bouillir l'impression». A travers ses œuvres, -une trentaine de peintures abstraites et une dizaine de sculptures-, exposées du 6 au 15 mai en cours à la galerie M'hamed Issiakhem (récemment rouverte), l'artiste tord, en effet, le cou à tous les protocoles habituels d'expression plastique, essentiellement par rapport au matériau utilisé. Il fait feu de tout bois, comme il le dit lui-même : «Je fais de la récupération d'un matériau considéré comme pauvre : du bois, du carton, du métal, tout est bon à prendre ; les choses qui ont eu une vie m'inspirent et me donnent envie de les faire renaître de nouveau ; chaque objet est comme un mot qui servira de langage plastique.» Ses formes métalliques, torsadées, enchevêtrées, évoquent des ébauches de silhouettes étranges, voire tourmentées, auxquelles il donne des noms énigmatiques : «Polémique», «Vanité», «Sans destin», ou encore «Ghaïta ou t'boul»…Quant à ses peintures, beaucoup les qualifient de «pessimistes», ce dont l'artiste s'en défend, avançant plutôt une autre vision des choses : «Certes, il y a une préoccupation existentielle, mais je continue à travailler, je crois à l'effort, au changement ; beaucoup se découragent, arrêtent de créer, gagnés qu'ils sont par l'amertume, mais je pense qu'il faut lutter, s'imposer, revendiquer ses droits.» Les préoccupations ? celles des artistes plasticiens sont légion. Hacène Chorfi évoque, entre autres, l'absence d'ateliers, ou autres espaces où pourraient éventuellement travailler les artistes, de marché de l'art, de statut, de considération, de véritable critique de l'art…Selon lui, «on fait appel à l'artiste pour commémorer des évènements creux, et de plus ce sont toujours les mêmes qui sont primés». Il rêve, pour lui et ses collègue, d'un espace de convivialité, où les artistes pourraient échanger des impressions, discuter de leurs expériences, s'écouter mutuellement … «J'invite le wali à faire un signe fort en direction des intellectuels et des plasticiens», dit-il. La manifestation historique que s'apprête à vivre Constantine devrait, selon lui, être une occasion de promouvoir l'art et de lui donner enfin la place qu'il mérite. Beaucoup d'artistes plasticiens et d'intellectuels que nous avons rencontrés à la galerie, voient en Hacène Chorfi, outre un artiste au talent indéniable, un homme d'une grande intelligence et de sensibilité.