La relation entre les banques et les entreprises algérienne n'est pas encore sortie de la zone de turbulence ou encore de sa « crise d'adolescence ». Elle demeure encore de forme « passionnelle ». C'est à la ville aux mille coupoles, à l'occasion de la 5e édition du symposium international d'El Oued, que pas moins de 200 personnes des milieux économiques algérien et étranger ont tenté de faire entendre la voix de la raison, le week-end dernier, en vue de réapprendre le métier. Comment réussir à transformer cette tentation en « un levier de création de valeur » ? C'est le thème autour duquel le MDI-Business School a bien voulu concentrer les débats. Pour les chefs d'entreprise comme pour les banquiers, beaucoup de frustrations. Djilali Mehri a vite fait de souligner à l'endroit du système bancaire algérien que l'arrivée des banques étrangères, si elle a permis un succès par le nombre, celui-ci n'en est pas moins un succès « relatif » si l'on regarde leur poids dans l'économie. Il est vrai en effet que l'engagement des banques étrangères dans le financement de l'économie est encore contenu dans la fourchette de 3 à 4%. Mais côté algérien ? Les dysfonctionnements sont multiples : financement classique, retard dans la mobilisation des crédits, effets de commerce non sécurisés, absence de dispositif de couverture de changes, royalties et la transparence... et la liste est longue. Pour sa part, Moncef Othmani, intervenant au nom de Forum des chefs d'entreprise, a considéré que « le développement de la sphère réelle dépend de la lutte contre les pratiques bureaucratiques et de l'amélioration du climat des affaires » dont l'impact sur l'activité bancaire n'est pas à démontrer. Selon lui, « les entreprises tiennent davantage compte de la qualité des services des banques que du coût du crédit ». Les explications et les commentaires des différents intervenants, si elles ont le mérite de rappeler la réalité, sont néanmoins édulcorées par Abderrahmane Benkhalifa, délégué général de l'Association des banques et établissements financiers (ABEF). De quelque côté que l'on essaye d'aborder les aspects de cette relation entre les deux entités économiques (banque et entreprise), elle semble épouser la forme d'une vie de couple en mal de confiance. Tout compte fait, en économie, comme en amour, il faut peut-être se convenir pas ses défauts. C'est en tout cas à cela que semble renvoyer les aveux de Benkhalfa lorsqu'il annonce : « Nous n'arrivons pas à conférer au financement des entreprises la même profitabilité que le commerce extérieur. » Selon lui, « nos banques ont domicilié 20 milliards de dollars dans le courant d'importations ». Ce montant convient à l'année 2005. C'est, d'après l'orateur, le créneau (le commerce extérieur) où il n'y a pas de conflit. Son diagnostic est tout prêt à l'emploi. « Ce conflit n'existe pas lorsque la profitabilité atteindra celui du commerce extérieur. » Les relations entre les deux entités sont conflictuelles sur le registre du financement de projets d'investissement au sens productif du terme. Benkhalfa considère que, à part les grands financement structurés, nombre de projets n'ont pas un business de bancabilité. Dans le marché corporat, a-t-il ajouté, 10 à 15% seulement des projets deviennent mûrs. En fait, la problématique dont il s'agit n'est rien d'autre que cette espèce de fatalité, admettent les banquiers, qui consiste à composer avec la structure des ressources. La banque, en effet, collecte des ressources courtes, mais elle doit en revanche distribuer des ressources longues aux entreprises. C'est à ce niveau qu'une intervention du professeur français d'économie et néanmoins cadre de BNP Paribas a dû rappeler à l'assistance que le métier de banque consiste justement à prendre des risques de transformation des ressources courtes en ressources longues. En d'autres termes, il s'agit pour les banques de réinventer le métier à travers la prise de risque, un risque de « transformation » bien sûr. Le symposium d'El Oued aura-t-il contribué dans la recherche des solutions ? La communication du directeur du MDI, Brahim Benabdessalem (qui a brillé par son absence), lue par le PDG de Saidal, président du Club Excellence Management, Ali Aoun, a en tout cas laissé planer un certain malaise. « Nous n'entendons pas ouvrir ici des débats sur les aspects dits ‘'politiques'' de la question », a-t-il noté. Un débat « qui nous dépasse », a-t-il souligné avant d'affirmer que le thème sera axé sur l'aspect de la « microéconomie ». Autrement dit, la question est celle qui fâche, car en dehors de la salle de conférences, les commentaires vont bon train sur ce que cette question bancaire représente comme enjeu de pouvoir, puisqu'elle est source d'enrichissement.Un paramètre qui s'effectue selon des affinités, politiques ou autres. Comme quoi, on n'est pas sorti de l'auberge. Enfin, il plane un climat de malaise au sein du symposium. Le politique y serait-il pour quelque chose ?