La croissance des entreprises est freinée par un accès problématique aux financements. La cinquième édition du Symposium d'El-Oued, organisé par le club Excellence Management, et consacré, cette année, à la problématique des relations banques-entreprises, s'est achevée, hier, sans avoir épuisé le sujet. La perception divergente de cette relation fait que la confrontation entre les deux acteurs prend souvent la tournure d'un dialogue de sourds. Pour les opérateurs économiques, et dans le contexte actuel de l'économie algérienne marquée par une ouverture de plus en plus grande, une concurrence exacerbée et un secteur bancaire reconnu comme étant le plus archaïque du bassin méditerranéen, sur lequel pèse encore lourdement le passé de l'économie administrée, l'avenir de l'entreprise dépend, en grande partie, de la possibilité qu'elle a à financer ses activités d'exploitation et d'investissement. Les conditions dans lesquelles ces contraintes doivent être assumées sont perçues de façon contradictoire, pour ne pas dire divergente, par les entreprises et leurs partenaires, les banques. Les critiques récurrentes et lancinantes adressées au secteur bancaire par la sphère réelle illustrent bien cette perception de nature conflictuelle. L'enjeu pour la croissance et l'emploi que représente le développement justifie une focalisation particulière sur les raisons de cette perception divergente de la relation banques-entreprises. La majorité des griefs retenus par les entreprises contre le système bancaire porte sur le dysfonctionnement et les lourdeurs, voire les excès des banques et leur impact dépressif sur l'activité réelle. les délais de traitement des dossiers de crédits sont trop longs. Les taux d'intérêt sont jugés trop élevés. Les circuits de paiement se caractérisent par des retards excessifs. L'ingénierie financière est quasi-inexistante au niveau des banques. L'accueil de la clientèle est médiocre. La situation de trop forte dépendance dans laquelle se trouvent les entreprises vis-à-vis de leurs banques, une situation qui trouve son origine dans l'absence d'un véritable marché financier qui reste embryonnaire en Algérie, du crédit-bail, du capital investissement et d'autres instruments adéquats expliquent cette relation passionnelle. Djillali Mehri souligne que la mobilisation des crédits se fait avec beaucoup de retard, le dénouement des opérations bancaires est encore contraignant, les chèques et les valeurs sont encaissés avec des délais trop importants, ce qui ouvre la brèche parfois à des comportements frauduleux, préjudiciables à l'entreprise et à la banque. Les banques relèvent que les dossiers de financement qui leur sont présentés sont de qualité médiocre et les garanties proposées sont surévaluées. L'entreprise algérienne, disent-elles, est sous-capitalisée. Son management est souvent de qualité insuffisante. L'absence de système d'information économique fiable pose des problèmes à la banque pour faire ses évaluations et ses analyses de risque, sur les projets d'investissement qui lui sont soumis. Le système judiciaire, d'une lenteur excessive, ne facilite pas les choses aux banques pour le recouvrement des créances auprès des débiteurs défaillants. Les positions exprimées par les uns et les autres contiennent toute une part de vérité. Pour autant, le couple banque-entreprise doit trouver une harmonie dans ses relations. Il doit construire et développer une confiance, essentielle pour libérer les énergies et permettre aux potentiels de l'entreprise et de la banque de se réaliser. C'est que l'économie algérienne a été, et demeure, pendant longtemps, une économie d'endettement. Les banques servaient de tiroir-caisse. Aujourd'hui, Ahmed Benbitour qui, dans son intervention, a évoqué des audits réalisés sur la qualité des actifs des banques, les risques liés aux passifs et à la capacité organisationnelle, et qui malheureusement sont restés lettre morte, relève également l'existence, de plus en plus, d'environnement mal sain, caractérisé par des scandales financiers et par une corruption rompante. L'ex- Chef du gouvernement estime que le passage de la budgétisation à l'intermédiation financière est un processus d'apprentissage. pistes de réflexion ont été esquissées à même de rendre les banques plus performantes et rendre les relations banques-entreprises plus harmonieuses. Benbitour parle de la nécessité de réhabiliter les banques, de les rendre plus autonomes et de les harmoniser avec leur environnement, de redresser la situation de leurs clients qui sont des entreprises publiques. Il estime aussi que l'aisance financière est telle qu'aujourd'hui, elle permet de financer les défaillances du système de gestion des banques, le coup des réformes et des transferts sociaux et aussi les investissements élevés dans les infrastructures. Benbitour affirme que les réserves de change représenteront 10 fois le stock de la dette. Elles dépassent actuellement les trois années d'importations. L'ex-Chef du gouvernement estime que les réformes sont en panne et note la mauvaise qualité de la croissance. Cette nécessité d'autonomie des banques revient comme un refrain dans les propos des hommes d'affaires. Pour ces derniers, il faudrait mettre les banques à l'abri des injonctions administratives. Meziane Rabhi