Agir sur la ville, processus actuels et problèmes d'action publique en urbanisme et aménagement. Maghreb, Algérie ». Tout un programme pour la conférence donnée jeudi dernier au CCF de Constantine par Nadir Boumaza, professeur dans des universités de France et chercheur au CNRS. Le conférencier était certain de toucher à une problématique des plus sensibles, pas seulement chez nous, dira-t-il, et qui motive analyses, diagnostics et débats, souvent faits dans l'urgence devant les phénomènes de glissements de terrain, d'éboulements ou de manifestations populaires. « Le cas de la gestion du patrimoine en général et de la Médina en particulier mérite de signaler, cependant, le grand retard enregistré par l'Algérie comparée au Maroc et à la Tunisie », commente Boumaza. Dans ce domaine, dira-t-il, il n'existe pas d'autres alternatives que l'action. Une fois déclaré ce précepte, le conférencier avancera ensuite la base de cette action et quelques méthodes et instruments à utiliser. Il va relever l'absence de la ville et du fait urbain du débat politique et de la vie culturelle et l'abandon des intellectuels et des universitaires du terrain des idées sur ce sujet. Relevant aussi la particularité algérienne de la faiblesse, voire l'inexistence de ségrégation sociale de l'espace de la ville, Boumaza constate la prédominance de l'urbanisme non planifié dans les pays du Sud, due, selon lui, à la faiblesse de l'Etat. L'emploi peut devenir lui aussi un problème découlant du fait urbain quand il n'est pas traité en amont. Le conférencier, également membre fondateur de l'association Les deux rives qui agit en faveur du patrimoine architectural et maghrébin, défend, en effet, un point de vue constructiviste sur le renouvellement de l'urbanisme, préférant traiter d'abord le tissu urbain et réfléchir au fur et à mesure sur son développement par opposition à l'école qui planifie tout, y compris la vie sociale et l'emploi, avant la création de l'espace. Le contexte actuel serait marqué par l'évolution des approches et la multiplication des intervenants et des acteurs dans la ville, jugés salutaires après le recul de l'Etat central « incapable d'agir seul faute de moyens ». L'importance de la dimension technique de la gestion et l'aménagement est tout aussi soulignée par le conférencier qui préconise l'inscription de modalités de contrôle social à travers l'installation d'une sorte de conseil d'administration après la délégation de la gestion du réseau d'AEP, par exemple, à des sociétés privées, notamment étrangères. Par ailleurs, le professeur Boumaza avancera quelques principes pour agir sur la ville, à commencer par la considération de la ville existante comme base d'action, que la ville est un cadre de production de la société moderne et enfin la nécessité d'intégrer la dimension esthétique dans cette action. Le parterre, composé essentiellement d'universitaires spécialistes en architecture et en urbanisme, a réagi avec intérêt au contenu de la conférence. Le débat se serait prolongé n'était le temps imparti à la rencontre. Quelques-uns des intervenants étaient restés cependant, sur leur faim pour n'avoir pu avoir des réponses à leurs interrogations. Au sujet des projets qui touchent au patrimoine et qui posent un sérieux problème à Constantine, l'hôte de la ville des Ponts dira : « Constantine a bien résisté et résistera encore aux agressions urbanocides. » Il conseillera par ailleurs de laisser s'installer le débat citoyen pour faire avancer l'action, notamment au sujet de la démolition de la prison du Coudiat.