Un contentieux existe actuellement entre l'Algérie et la France sur la restitution de certaines pièces archéologiques et d'œuvres d'art. L'annonce a été faite hier par Khalida Toumi, ministre de la Culture, lors de l'émission « Questions de l'heure » de la Chaîne III, de la Radio nationale. La ministre a parlé des « têtes coupées » de statues à Cherchell, de deux tableaux et de copies de gravures rupestres faites par Henri Lhote (auteur de A la découverte des fresques du Tassili). Elle a évoqué également les registres des musées nationaux pris par la France après l'indépendance du pays en 1962. « Nous n'avons jamais récupéré ces registres en dépit des demandes renouvelées, à chaque fois, par l'Algérie », a précisé la ministre. « Nous avons sollicité les autorités françaises et nous n'avons reçu aucune réponse. Je fais confiance à la diplomatie algérienne pour régler ce contentieux », a-t-elle ajouté. Abordant le volet de la préservation du patrimoine, Khalida Toumi a annoncé un projet de coopération avec l'Espagne pour la restauration du fort de Santa Cruz, situé sur le mont Murdjadjo, à Oran. L'Algérie entend profiter de l'expérience espagnole en matière de préservation de monument. Construit au XVIe siècle, Santa Cruz, délaissé pendant un temps, est, selon la ministre, un patrimoine commun à l'Algérie et à l'Espagne. Un peu plus de 30 millions de dinars seront dégagés pour restaurer ce monument. Cela fera, probablement, plaisir aux animateurs de l'association Bel Horizon qui se bat, depuis 2001, pour la sauvegarde de Santa Cruz et de l'ensemble du patrimoine historique d'Oran. Bel Horizon aspire à la création, au sein du fort Santa Cruz, d'un musée du vieil Oran. Khalida Toumi a annoncé l'élaboration d'un programme pour la préservation de la citadelle d'Alger. Un accord sera bientôt signé avec un bureau d'études polonais (PKZ, qui a élaboré un premier projet en 1986) pour les opérations de restauration de la citadelle d'Alger. Quatre bureaux d'études seront sollicités pour la même opération. Selon la ministre, des accords seront signés avec les Italiens et les Turcs pour la restauration du palais du dey et de la mosquée du dey à Alger. « Nous voulons profiter de l'expertise italienne et former des archéologues et architectes aux techniques de la préservation et de la restauration des sites et monuments », a-t-elle dit. Elle a annoncé l'élaboration du plan permanent de sauvegarde de La Casbah d'Alger, qui sera finalisé l'année prochaine. Elle a critiqué les plans précédents qui, selon elle, n'ont abouti à aucun résultat. Inutile de s'interroger sur la destinée des budgets qui ont été dégagés pour les besoins de ces « plans ». La ministre de la Culture a qualifié de « massacre » les opérations de restauration du mausolée de Massinissa à Constantine, au cœur d'une polémique depuis quelques semaines. Elle a critiqué le wali de Constantine qui ordonné le début des travaux sans consulter le ministère de la Culture et sans études préalables. Elle a laissé entendre qu'une plainte sera introduite en justice contre les auteurs du « massacre ». Elle a déclaré ne pas comprendre pourquoi de telles opérations sont dirigées par des structures qui ne sont pas habilitées à le faire (la Duch, qui relève de l'urbanisme, pour le cas du mausolée de Massinissa). Comme elle n'a pas caché son étonnement devant un projet baptisé « Village numide », prévu autour de ce même mausolée, dont les contours ne paraissent pas clairs. Sur un autre chapitre, Khalida Toumi a révélé que le gouvernement étudie actuellement la faisabilité de « détaxer » les livres pour une meilleure accessibilité au lectorat. La réduction des taxes est également une revendication permanente des professionnels. La ministre a fait un plaidoyer pour former le lectorat de demain avec, entre autres, l'ouverture des établissements scolaires sur le monde des bibliothèques. Le ministère de la Culture, qui élabore actuellement un état des lieux de la lecture en Algérie, a décidé d'ouvrir 30 annexes de la Bibliothèque nationale à travers le pays pour « populariser » la lecture. Le projet s'étale jusqu'à 2009. En outre, un projet de loi-cadre sur le livre est en phase de préparation (au même titre d'un texte sur le cinéma) et sera prêt avant la fin 2006. A souligner enfin qu'un projet de création d'une école régionale des beaux-arts, devant permettre à des non-bacheliers de s'y inscrire, est en cours d'étude. Selon Khalida Toumi, l'Ecole supérieure des beaux-arts, qui est également soumise à la tutelle du ministère de l'Enseignement supérieur, ne sera ouverte qu'aux bacheliers.