Depuis le 29 juillet dernier, le groupe Fertial, propriétaire des deux complexes d'engrais d'Arzew et de Annaba, tourne au minimum technique garanti après que l'Agence de régulation des hydrocarbures (ARH) eut ordonné une baisse de 30% des livraisons de gaz naturel aux deux complexes. Une des deux unités d'Arzew serait actuellement à l'arrêt par manque d'énergie. La décision de l'ARH est motivée, selon une correspondance référenciée 1247/ARH/13 du 1er juillet 2013, adressée au partenaire étranger, par les conclusions d'audit et d'inspection réalisés en 2013 sur les deux sites de production d'ammoniac d'Arzew et de Annaba. La correspondance de l'ARH, évoque «la non-mise en conformité des installations et des équipements de Fertial», «le constat de surconsommation en énergie et en charges enregistrée au niveau des deux complexes de Annaba et Arzew», «la non-réalisation par le groupe Villar Mir des engagements et objectifs fixés dans l'accord de partenariat avec l'EPE Asmidal, notamment en matière de mise à niveau des deux complexes, optimisation de la consommation spécifique du gaz naturel, la mise en œuvre du plan de choc pour la maintenance des installations». En effet, selon la seconde mise en demeure de la Société algérienne de gestion du réseau de transport du gaz chargée de l'application de la décision de l'ARH, Fertial avait été sommée le 25 juillet de réduire progressivement sa consommation de gaz en 3 phases pour atteindre 810 000 Nm3/j (normaux mètres cubes par jour) sous peine d'être «débranché» totalement du circuit de l'alimentation en gaz. Ce qui a été fait. Qualifié de «risquée» par l'actionnaire espagnol qui détient une majorité des actions estimée à 66% dans une joint-venture réalisée avec l'EPE Asmidal, cette décision n'a pas laissé indifférent le partenaire étranger issu du groupe Villar Mir qui est allé se plaindre au ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, évoquant des risques industriels impactant vraisemblablement l'outil de travail et la production des engrais, dont l'agriculture algérienne sera la première victime. Le 5 août dernier, c'est Jorge Requena, l'administrateur et le directeur général de SPA Fertial qui prend le relais en écrivant au président du comité de direction de l'ARH pour lui faire savoir qu'«avec la consommation de 810 000 cm3/j, Fertial Annaba sera obligée de stopper toutes ses unités. Ce qui va impliquer que la campagne agricole 2013/2014, pour ce qui relève de la fertilisation, ne pourra pas disposer d'engrais fabriqués en Algérie et il faudra que les importateurs assurent le relais. Je tiens à vous informer que je dégage toute ma responsabilité des graves conséquences que cela va entraîner pour l'agriculture algérienne». Sur le plan social, c'est la Fédération nationale des travailleurs du pétrole gaz et chimie (FNTPGC) qui est allée défendre les employés auprès du ministre de l'Energie et des Mines après avoir été saisie par le syndicat de l'entreprise Fertial. Dans une correspondance dont El Watan a pu se procurer une copie auprès d'une source proche du même ministère, Sid Ali Beldjerdi a tenu à attirer l'attention sur les retombées de cette décision sur le plan social avec arguments solides et en toute objectivité. «Tout en étant respectueux des décisions prises par l'ARH et les missions qu'elle accomplit inhérentes à la préservation des intérêts économiques pour ce qui est du secteur des hydrocarbures et pour laquelle nous nous engageons pleinement, nous portons à votre connaissance que les dernières décisions qu'elle a prises et qui somment Fertial à s'y soumettre risquent d'hypothéquer sérieusement les acquis sociaux des collectifs de cette entreprise», a-t-il écrit dans ce document avant de proposer une solution : «Il aurait été plus judicieux d'exhorter et de presser Fertial à honorer ses engagements inhérents à l'investissement qu'elle a souscrit lors de la signature du partenariat avec Asmidal sans pour autant mettre en péril les acquis des collectifs et les intérêts économiques en général.» Sur le plan économique, le même syndicaliste estime dans son écrit : «L'exécution de ces dernières mesures pourrait induire l'alourdissement des dépenses en devises pour l'économie nationale dans la mesure où Fertial ne pourrait pas subvenir aux besoins en engrais pour le compte de la campagne agricole 2013/2014.» Selon plusieurs observateurs, dont des Espagnols, cette décision n'est qu'un prélude à une bataille pour le contrôle du capital de Fertial qui emploie plus de 1400 travailleurs et dispose d'un réseau de sous-traitants de près de 5000 personnes. En effet, les chiffres sont alléchants et les résultats économiques réalisés par Fertial, comme indiqué par l'administrateur espagnol, le sont aussi. Ils font état d'un investissement effectué, depuis 2005, équivalent à plus de 231 millions d'euros et une production recors de 858 000 tonnes de production d'ammoniac en 2012. Quant au business plan signé lors du partenariat, il a été réalisé à 95%. La dernière sortie de Jorge Requenat Lavergne indique que Fertial va investir 250 millions d'euros dans les 5 années à venir.